Cas n°6 corrigé – Toux… ou rien.

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Commentaire : Un cas entier et général sur l’item 86, qui a pour but de faire un rappel sur les différents germes, les stratégies diagnostiques et les stratégies thérapeutiques, de l’hospitalisation à l’antibiothérapie. De 2004 à 2011, les pneumonies ne sont jamais tombées aux ECN (la BPCO est tombée une fois). Accrochez-vous pour comprendre ce cas : il est finalement assez simple et ouvert, et il devrait vous aider à ne pas vous mélanger les pinceaux le jour J entre bronchite, pneumonie, communautaire, gravité, ambulatoire, atypique… et autres joyeusetés.

 

Sources :

–          Powerpoint de Mathilde Carré, mars 2011

–          Mise au point sur l’antibiothérapie dans les infections respiratoires basses de l’adulte : pneumonie aiguë communautaire, exacerbations de Bronchopneumopathie Chronique Obstructive (AFSSAPS et SPILF 2010)

–          E. Pilly, maladies infectieuses et tropicales, 2010 (22ème édition)

–          Mise au point : antibiothérapie dans les infections respiratoires basses de l’adulte : pneumonie aiguë communautaire, exacerbations de Bronchopneumopathie Chronique Obstructive (AFSSAPS et SPILF 2010)

–          Pneumologie, 6ème éd. COLLection MEDecine, Sergio Salmeron

–          Prise en charge de la BPCO (société de pneumologie de langue française mise à jour 2009)

–          Bulletin épidémiologique hebdomadaire 2011

–          http://www.respir.com

Items :

–          76 – Vaccinations. Bases immunologiques, indications, efficacité, complications

–          86 – Infections broncho-pulmonaires du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte

–          173 – Prescription et surveillance des antibiotiques

–          227 – Bronchopneumopathie chronique obstructive

 

1/ Quel diagnostic suspectez-vous ? Justifier. Sur quel(s) critère(s) décidez-vous d’introduire une antibiothérapie ? (15 points)

 

Exacerbation Aiguë de BPCO (EABPCO) / Bronchite aiguë sur BPCO 4
Terrain : NC
BPCO connue 1
Anamnèse (bronchite aiguë) : acutisation des symptômes respiratoires
Toux NC
Productive / Expectorations NC
Fièvre modérée / Syndrome infectieux NC
Dyspnée / Aggravation de la dyspnée NC
Auscultation pulmonaire sans bruits surajoutés NC
Différentiel (pneumonie) :
Absence de foyer radiologique 1
PAS DE POINT SI « DECOMPENSATION DE BPCO »  (= EABPCO MENACANT LE PRONOSTIC VITAL)
D’origine bactérienne probable (Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae, Moraxella catarrhalis, Mycoplasma pneumoniae, Legionella pneumophila) : NC
Critères modifiés d’Anthonisen 2
2 critères majeurs ou 1 critère majeur + 1 critère mineur NC
Critères majeurs :
Aggravation de la dyspnée / Baisse de la tolérance à l’effort 2
Augmentation de la purulence des expectorations 2
Augmentation du volume des expectorations NC
Critères mineurs :
Infection des voies aériennes supérieures dans les 5 derniers jours / rhume récent 1
Fièvre sans cause apparente 1
Augmentation de la fréquence respiratoire ou cardiaque de 20% NC
Aggravation de la toux 1
Augmentation des sifflements NC
☼ L’EABPCO est un facteur aggravant le cours évolutif de la BPCO. Les causes sont variées : virale, bactérienne, pollution (SO2, NO2, ozone, particules), embolie pulmonaire plus rarement (ne justifiant pas une recherche systématique)… ☼
☼ Autres complications de la BPCO : insuffisance respiratoire chronique, emphysème centrolobulaire (et pneumothorax), insuffisance cardiaque droite, fibrillation auriculaire ☼

 

2/ Que pensez-vous de l’antibiothérapie proposée par le médecin traitant ? Justifier. Est-elle active sur le Pneumocoque de Sensibilité Diminuée à la Pénicilline (PSDP) ? (10 points)

 

Antibiothérapie adaptée / indiquée 5
Dyspnée d’effort (VEMS non donné dans le texte) 1
ET
Expectoration purulente verdâtre 1
☼ Même en absence des EFR, on peut estimer le VEMS du patient entre 30% et 50%  chez ce patient compte tenu de son traitement incluant un bronchodilatateur à longue durée d’action et un corticostéroïde inhalé (stade III), sans oxygénothérapie longue durée (stade IV) ☼
NON / Inactive sur le PSDP 3
Céphalosporine de troisième génération orale, réservée aux infections non sévères : NC
Spectre élargi sur les Bacilles Gram Négatif et diminué sur les Cocci Gram Positif par rapport aux C1G, C2G et pénicilline A (amoxicilline) NC
Mauvaises performances pharmacocinétiques avec faible disponibilité (absorption digestive saturable) NC

 

3/ Interprétez la radiographie de thorax de face.  (10 points)

Radiographie de thorax de face NC
Opacité 1
Mal systématisée NC
Du lobe inférieur droit (pas de signe de la silhouette) 2
Avec bronchogramme aérique 2
Non rétractile 1
Conclusion : syndrome alvéolaire 4

 

4/ Quel diagnostic suspectez-vous maintenant ? Justifier. Quel score d’utilisation simple vous permet d’évaluer la nécessité ou non d’une hospitalisation ? Décrivez-le.  (20 points)

 

Pneumonie aiguë communautaire lobaire inférieure droite de l’adulte 4
Bactérienne, insuffisamment traitée par C3G orale NC
PAS DE POINT SI OUBLI COMMUNAUTAIRE
Terrain :
BPCO (troubles de ventilation, corticostéroïdes inhalés) 1
Anamnèse :
Expectorations purulentes 1
Syndrome infectieux (fièvre) 1
Clinique : crépitants 1
Radiographie : foyer / syndrome alvéolaire 1
Différentiel (pneumonie aiguë nosocomiale) : milieu extra-hospitalier NC
Score simplifié CRB65 2
Confusion / Troubles neurologiques 2
Respiratory rate > 30/min / Fréquence respiratoire haute / Tachypnée 2
Blood pressure TAS < 90 mmHg, TAD < 60 mmHg / Hypotension artérielle / Troubles hémodynamiques 2
> 65 ans 2
Si « SCORE DE FINE » 2
☼ Hospitalisation si au moins 1 critère parmi 4 ☼

5/ Y a-t-il des arguments pour un germe atypique dans cette observation ? Justifier. (10 points)

 

NON 3
Arguments pour le Pneumocoque / Streptococcus pneumoniae
Terrain : âge > 65 ans (atypique : jeune < 40 ans) NC
Symptômes ORL (rhume) 1
Début brutal 2
Pas de signes extra-respiratoires 2
Pas de syndrome interstitiel / Syndrome alvéolaire (classiquement pneumopathie franche lobaire aiguë PFLA) 1
Pas de voyage récent 1
Légionella pneumophila (ANTIGENURIE, SEROLOGIE)
Terrain : alcoolo-tabagisme, immunodépression NC
Contamination hydro-aérique (climatisation, voyage récent) NC
Début progressif, fièvre élevée (40°C), AEG rapide avec hospitalisation en USI/réanimation souvent nécessaire NC
Signes extra-respiratoire : troubles de conscience, troubles digestifs (diarrhées, vomissements), rhabdomyolyse (crampes), pleurésie, cytolyse hépatique, insuffisance rénale, hyponatrémie, hypophosphorémie NC
Syndrome alvéolo-interstitiel disséminé bilatéral (ou PFLA !) NC
Mycoplasma pneumoniae (AGGLUTININES FROIDES, SEROLOGIE)
Terrain : collectivités (enfant scolarisé, adulte jeune) NC
Début progressif NC
Toux sèche rebelle et persistante NC
Signes extra-respiratoires : malaise, céphalées, neurologiques (méningite, encéphalite, polyradiculonévrite, myélite), cardiaques (myo/péri/endocardite), cutanés (érythème polymorphe (cocardes), érythème noueux, syndrome de Stevens-Johnson), hépatite, arthrite, anémie hémolytique auto-immune NC
Syndrome interstitiel des bases NC
Chlamydophila pneumoniae (ancien Chlamydia pneumoniae)
Contamination interhumaine NC
Sinusite / pharyngite 10 jours avant le début NC
Début progressif NC
Signes extra-respiratoires : myalgies, rash cutané, splénomégalie NC
Chlamydophila psittaci (perroquets) NC

 

6/ Que pensez-vous du choix de l’antibiothérapie ? Quel aurait été l’antibiotique de choix dans cette pathologie chez ce patient, en ambulatoire ? Pour quel(s) germe(s) ? (10 points)

 

Antibiothérapie inadaptée / non indiquée (dans le traitement des pneumonies aiguës communautaires sans argument pour un germe atypique, en première intention) 3
Macrolides : 50% de résistance pour Streptococcus pneumoniae (modification de la cible par méthylation), résistance fréquente de Haemophilus influenzae ; intérêt pour les germes atypiques (Mycoplasma, Legionella) NC
Aminosides : résistance naturelle des Streptocoques, des bactéries intracellulaires et des anaérobies ; intérêt pour les pneumonies nosocomiales à Bacilles Gram Négatif NC
Antibiothérapie probabiliste visant impérativement Streptococcus pneumoniae (Pneumocoque) par argument de fréquence et de gravité ET élargie aux bactéries avec β-lactamases devant le terrain (BPCO) : NC
Amoxicilline-acide clavulanique AUGMENTIN 1 g x 3/jour PO
OU lévofloxacine (pas de point si moxifloxacine, cf. infra)
OU ceftriaxone 3
Germes visés :
Streptococcus pneumoniae / PSDP (Pneumocoque de sensibilité diminué à la pénicilline) 2
Haemophilus influenzae (intérêt de l’acide clavulanique) 1
Moraxella catarrhalis / Branhamella catarrhalis (intérêt de l’acide clav.) 1
☼ Les macrolides sont actifs sur Streptococcus, Staphylococcus aureus méti-S, lesbactéries intracellulaires (Mycoplasma, Chlamydia, Legionella, Treponema) sauf Coxiella burnetti (fièvre Q, traitée par cyclines)☼
☼ Les aminosides sont réservés aux infections avec signes de gravité, à Bacilles Gram Négatifs aérobies, Pseudomonas aeruginosa, Listeria monocytogenes, Staphylococcus aureus méti-S, endocardite streptococcique, fièvre chez l’immunodéprimé. Leur toxicité rénale, auditive et neurologique implique une utilisation précautionneuse, en prises espacées de 24h, avec pic après chaque injection (efficacité – antibiotique concentration-dépendant) et creux précédant chaque réinjection (tolérance). ☼
☼ L’acide clavulanique est un inhibiteur de bêta-lactamase, actif sur les pénicillinases des BGN – y compris les enzymes chromosomiques et plasmidiques se transmettant entre bactéries (50% H. influenzae, E. coli, 90% M. catarrhalis) – ainsi que sur les pénicillinases des anaérobies stricts et BLSE. Il n’a AUCUN intérêt sur le PSDP (sensibilité diminuée par une modification de la Protéine Liée à la Pénicilline PLP). Le PSDP reste sensible à l’amoxicilline ou aux C3G. ☼
☼ La lévofloxacine est à utiliser en absence de prescription de fluoroquinolone FQ dans les 3 derniers mois, dans les pneumonies aiguës communautaires sévères de réanimation et la Légionellose (elle est aussi active sur le Pneumocoque). Il faut éviter d’utiliser les fluoroquinolones en institution car il y a des risques de transmission de souches résistantes ; elles sont aussi à éviter en cas de corticothérapie systémique car le risque de tendinopathie est accru avec le catabolisme musculaire cortico-induit. Enfin, la moxifloxacine (autre FQ anti-pneumococcique) est à réserver aux pneumonies communautaires quand aucun autre antibiotique ne peut être utilisé ☼

 

7/ Détaillez votre bilan infectieux paraclinique (4 types d’examens). Quel changement d’antibiothérapie allez-vous réaliser, en hospitalisation ? (15 points)

 

BILAN A VISEE ETIOLOGIQUE :
Examen CytoBactériologique des Crachats (ECBC) avec examen direct, antibiogramme et culture 2
Antigénuries Pneumocoque et Legionelle type 1 2+2
Sérologies de germes atypiques (Chlamydia, Mycoplasma, Legionella) 2
Hémocultures aéro-anaérobies lors des pics fébriles et frissons 2
ZERO SUR CINQ SI PLUS DE QUATRE TYPES
ANTIBIOTHERAPIE
Arrêt de roxithromycine et nétilmicine 3
Antibiothérapie probabiliste intraveineuse, secondairement adaptée à l’antibiogramme, active sur S. pneumoniae, H. influenzae, M. catarrhalis : NC
Ceftriaxone ROCEPHINE IV/IM/SC 1 à 2 g x 1/j
OU Céfotaxime CLAFORAN IV 1 à 2 g x 3/j
OU amoxicilline-acide clavulanique AUGMENTIN PO/IV 1 g x 3/j
OU lévofloxacine 2
☼ L’ECBC a de bonnes valeurs diagnostiques (sensibilité, spécificité) pour les pneumonies à Pneumocoque. Surtout si elles sont bactériémiques et non décapitées par une antibiothérapie préalable.
L’antigénurie Pneumocoque a une sensibilité de 80% dans les PAC bactériémiques, 50% dans les PAC non bactériémiques. Elle n’est pas négativée par 7 jours d’antibiotiques, et la positivité persiste plusieurs semaines (peu de faux positifs).
L’antigénurie Legionella a une sensibilité de 86% et spécificité de 93% ; elle se positive 1-3 jours après le début de la maladie et peut durer un an. ☼

8/ Rappelez-lui le principe de la vaccination. Pourquoi monsieur R. a-t-il bénéficié des vaccinations antigrippale et antipneumococcique ? Expliquer brièvement pourquoi il pourrait développer une infection à Pneumocoque malgré la vaccination. (10 points)

Administrer une préparation antigénique NC
Permettant d’induire chez l’individu vacciné une REPONSE IMMUNITAIRE 2
Capable, en cas d’exposition ultérieure à l’agent infectieux, d’éviter la survenue de la maladie ou d’en atténuer ses manifestations cliniques NC
Il s’agit une IMMUNOPROPHYLAXIE ACTIVE 3
☼ L’immunoprophylaxie active (vaccinothérapie : antigène) apporte une protection différée et durable. L’immunoprophylaxie passive (sérothérapie : immunoglobulines humaines) apporte une protection immédiate et transitoire. ☼
Vaccination antigrippale recommandée annuellement car :
Age > 65 ans 1
ET/OU affection broncho-pulmonaire chronique 1
☼ Autres indications : cardiopathie congénitale, néphropathie chronique grave, drépanocytose, diabète traité, immunodépression cellulaire, établissement de santé moyen/long séjour, enfant sous aspirine prolongé pour maladies de Kawasaki ou de Still, entourage familial d’un nourrisson de moins de 6 moins présentant des facteurs de risque de grippe grave (prématuré, bronchodysplasie, immunodépression) ☼
Vaccination antipneumococcique Pneumo23 recommandée tous les 5 ans à partir de l’âge de 5 ans :
Pour toute pathologie exposant à un risque élevé d’infection invasive à Pneumocoque / insuffisance respiratoire 1
☼ Autres indications : asplénie fonctionnelle/splénectomie, drépanocytose homozygote, VIH, syndrome néphrotique, insuffisance cardiaque, hépatopathie chronique, antécédents d’infection pulmonaire ou invasive à Pneumocoque ☼
☼ Le PREVENAR 13 ou vaccin conjugué à 13 valences est recommandé avant 2 ans par 2 injections à 1 mois d’intervalle dès l’âge de 2 mois, avec un rappel entre 12 et 15 mois. Il est également recommandé entre 2 et 5 ans en cas de facteurs de risque d’infection à Pneumocoque (cf. supra, en ajoutant implants cochléaires) ☼
Il s’agit d’un vaccin polyosidique à 23 valences (Pneumo23) / Il ne couvre que 23 des 90 sérotypes de Streptococcus pneumoniae / Il ne couvre pas tous les sérotypes 2
La vaccination ne remet donc pas en cause actuellement la conduite à tenir devant une pneumonie (toujours viser le Pneumocoque, « celui qui tue ») NC
☼ Les recommandations vaccinales générales visent des maladies concernant tous les individus, en particulier les infections à potentiel épidémique vis-à-vis desquelles il est nécessaire d’obtenir une couverture vaccinale suffisante pour développer une immunité de groupe capable d’interrompre la transmission de l’agent infectieux (variole) ☼
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