– Je ne comprends pas… Sur Infolignes, vous annonciez qu’il y avait un train.
– Infolignes, vous savez, c’est internet. On ne peut pas s’y fier.
– C’est votre site officiel des horaires en direct des trains circulant.
– Oui mais quand même. C’est internet.
– Bon, bref. Depuis hier vous annonciez que le train de 11h circulait jusqu’à Calais. Et là il est où ?
-Non, mais finalement quand ils sont partis, à Paris, ils ont décidé qu’il s’arrêterait à Lille.
– Et comment je fais pour rentrer à Boulogne moi, alors ? Hein ? Et mes parents qui m’attendent à Calais à 11h30 ?
– Ecoutez, le plus simple, c’est de prendre le train de 17h, changer à Hazebrouck, prendre un autocar et vous serez à Boulogne vers 19h30.
– C’est tout ce que vous avez à me proposer ?
– Sinon, vous avez un train à 18h30 qui arrive à 19h30.
– Vous vous foutez de moi c’est ça ? Vous ne savez pas de quoi je suis capable, moi ! Je vais tout casser.
– Ah bon, et avec quoi ?
– Avec ce brise-vitre, par exemple !
– Impossible, ah ah ! Il est protégé par une vitre.
– C’est vrai ça. C’est débile, et en cas d’accident ?
– Ah écoutez, nous, c’est la sécurité du client avant tout !
(Introduction à la manière du blog d’Inzecity…)
Voici l’heure de la rentrée des classes. On range les seaux, les pelles, les matelas gonflables, et on ressort le cartable, le film transparent et la banderole militante.
Pendant l’été, tandis qu’un certain nombre de lois sont promulguées, aucun mouvement social ne pointe jamais sa pancarte. Puis vient l’heure de la rentrée et, pour une raison certainement anodine de calendrier, le Gouvernement propose son gros projet de réforme contesté sur les retraites. Evidemment, il n’en faut pas plus pour que la France quasi-entière se mette à exercer son deuxième sport préféré après le football : la grève (d’après un sondage Ifop réalisé sur un échantillon représentatif de 890 manifestants selon les sondeurs, ou 32 selon les sondés)
Ces journées de grève, ou « JINT » (Journées Individuelles Non Travaillées), sont suffisamment rares pour que chacun en profite un peu. Aujourd’hui, au terme de cette grande journée de protestation contre les retraites, voyons ce que les quelque 20% de grévistes ont fait de leur journée (d’après un sondage Ifop réalisé sur quelques personnes représentatives de la population à laquelle ils appartiennent) :
- 6% étaient dans les rues, brandissant leur banderole et exprimant leurs idées nouvelles sur l’économie en psalmodiant divers slogans : « Les retraites c’est pas pour les biquettes », « la retraite j’en veux dans mon assiette », « Sarkozy 2012, et après y’aura plus de flouze », « Domenech, licencié, Domenech… » (à la manière des soirées où certains dansent toujours un slow ou un rock, il y a également des gens un peu décalés dans toute bonne manifestation) ;
- 2% étaient en train de se creuser la cervelle sur le thème de « mais-où-vais-je-donc-mettre-mes-récentes-acquisitions-de-la-braderie-de-Lille-? » ;
- 3% étaient chez eux (ou plutôt chez elles) pour recouvrir de film transparent les cahiers et livres de leurs enfants, tandis qu’un de leur professeur sur 5 défilait dans les rues, battant le pavé, le retournant de ses pas cadencés, pour voir si par hasard on ne pourrait pas trouver la plage en-dessous ;
- 8% enfin s’évertuaient à pourrir la journée de leurs concitoyens qui n’avaient jusque là rien demandé à personne, en bloquant stupidement les rames de métro (à moins que ça ne soit juste un problème de perception entre contenant et contenu humain possible), en annonçant des trains fantômes (cf. introduction), en bloquant les autoroutes…
- enfin, 1% se posait la question suivante : « puisque le PS a assuré qu’il reviendrait à l’âge légal de la retraite à 60 ans s’il était élu en 2012, et que la réforme prévue par le Gouvernement se met progressivement en place jusqu’à 2018, pourquoi nous en faire, pourquoi ne pas simplement voter à gauche, pour une gauche réun… oui, non, c’est stupide, je ferais mieux d’aider ma femme à recouvrir les bouquins des gosses. »
Et puis ensuite vient le moment où le Gouvernement décide de lâcher un peu de lest sur un projet préalablement surestimé, à la manière des bradeux de Lille qui quelques jours avant la braderie s’étaient dit « double le prix, et ce jour-là, même si tu baisses d’un quart, tout le monde sera content. » Alors la grève s’arrête, enrayée en chemin par la bonne humeur secondaire au succès de l’équipe de France (sûrement une partie du Grand Complot), et on se résigne à bosser jusqu’à la mort… Ce qui fera l’objet du prochain article !
A la semaine prochaine… si tout va bien !
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