Sur son blog, @Dr_Agibus a publié deux articles de synthèse très intéressants, sourcés, suite aux algorithmes produits par @DocTotoscope, dont je recommande ardemment la lecture :
Et du coup, suite à cette lecture, j’ai une interne en stage au cabinet qui m’a demandé quel était mon choix thérapeutique en pratique dans l’HTA.
Il se trouve que j’ai une vision centrée sur les effets indésirables dans mon choix d’anti-HTA (@Dr_Agibus en parle : « Bien évidemment, les molécules proposées sont à discuter avec les patients compte tenu de leurs effets indésirables (…) L’algorithme tend à privilégier l’efficacité plutôt que le risque d’effets indésirables non graves (la tolérance) car en tant que MG nous pouvons revoir les personnes traitées très rapidement pour adapter le traitement. »).
Mes choix différent donc un peu là-dessus : c’est assez personnel, mais je vous partage les 3 règles assez simples que j’ai en tête lorsque je choisis…
- si patients à risque d’oedèmes de membres inférieurs (insuffisance veineuse notamment, patient utilisateur de chaussettes de contention, etc.), j‘évite les inhibiteurs calciques en premier (et privilégie donc IEC ou diurétique thiazidique)
- si patients à risque de toux chronique (asthme, BPCO, tabagisme ancien), j’évite les IEC en premier (et privilégie donc inhibiteur calcique ou diurétique thiazidique) — bien sûr, si pas d’indication nette de l’IEC par ailleurs (IDM, insuffisance cardiaque, protéinurie…)
- si patient à risque d’insuffisance rénale, de carcinome épidermoïde ou ayant une dysfonction érectile, j’évite le diurétique thiazidique en premier (et privilégie IEC ou inhibiteur calcique)
Rien n’est figé évidemment… Je dis « j’évite » mais ça n’est pas non plus un repoussoir : c’est juste que je me vois avec le patient 1 mois plus tard, qui a des OMI majorés, qui tousse pendant 2 mois l’hiver, ou qui a une clairance passée à 50 où je me pose la question de lancer un bilan d’insuffisance rénale chronique qui est probablement favorisé par mon traitement. Mais rien de dramatique ou d’ingérable en médecine générale, où on peut revoir régulièrement les patients.
Pour les patients qui ont une découverte d’HTA, qui m’ont répondu « non, je n’ai jamais les jambes qui gonflent », qui ne sont ni asthmatiques ni BPCO ni insuffisant rénale modéré à sévère, qui n’ont pas de dysfonction érectile ni de carcinome épidermoïde… eh bien avant je mettais plutôt IEC, et maintenant je mets davantage d’indapamide, suite à la lecture de @Dr_Agibus principalement (c’était aussi la reco de Prescrire).
Je débute aussi généralement par une monothérapie, réévaluée à 1 ou 3 mois sur des choix individuels (en gros, automesure à 143/87 mmHg, ça ne me choque pas de mettre un traitement de 3 mois si ça correspond aux choix du patient) :
- En IEC, je privilégie ramipril ; parfois enalapril ou perindopril en associations (ramipril+hydrochlorothiaide, enalapril+lercanidipine, perindopril+indapamide)
- En ARA2 (si intolérance aux IEC), je privilégie valsartan (AMM la plus large)
- En inhibiteur calcique, je préfère lercanidipine qui donne moins d’OMI qu’amlodipine ; si tendance à la tachycardie, je mets verapamil à la place (bradycardisant – donne aussi des OMI, mais on peut tenter quand même si OMI sous lercanidipine et amlodipine).
- En diurétique thiazidique, ça dépend (je mets de plus en plus d’indapamide suite aux annonces de carcinome épidermoïde sous hydrochlorothiazide et aux lectures de Medicalement Geek)
La bithérapie d’emblée, je la réserve si la TA est > 160/100 à la maison (quand même rare qu’on n’ait rien introduit entre temps…) ou chez un patient complexe à suivre (marin, routier, etc.), et bien sûr si elle va être bien tolérée a priori (ça m’embête de balancer une bithérapie sur découverte d’HTA à 88 ans disons). Mais comme je suis assez orienté par la tolérance dans mes choix thérapeutiques dans l’HTA, j’évite aussi la bithérapie d’emblée, parce qu’en cas d’effet indésirable peu spécifique, on se prive potentiellement de 2 molécules !
Enfin, en cas d’intolérance à l’une des 3 classes (IEC/ARA2 – inhibiteur calcique – diurétique thiazidique ou apparenté), il y a soit la possibilité de mettre de la spironolactone… Lorsque l’ajout de spironolactone ne semble pas pertinent (ou mal toléré) et devant un patient avec des TA au plafond, je mettais parfois de la rilménidine (parce que me semblait mieux tolérée que les bêta-bloquants, notamment pour les efforts…) mais c’est vraisemblablement une erreur : mieux vaut tenter un bêta-bloquant qui a montré son efficacité sur la réduction de morbimortalité (métoprolol que les MG peuvent prescrire).
Voilà. Je ne détaille pas plus ; pour le choix sourcé sur l’efficacité, je vous renvois à nouveau sur l’article de @Dr_Agibus : Pour traiter l’HTA, tu fais quoi ? (et la fiche sur le diabète <3)