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Pour les futurs internes de médecine générale…

J’aime bien raconter d’où viennent les billets de blog, surtout quand c’est un peu original… Cette fois, c’est une Miss France et future interne en médecine générale à Paris qui m’en a donné l’idée avec ce tweet ^^

L’occasion ici de parler de Marine Lorphelin qui, malgré une voie toute tracée, a préféré reprendre ses études et a tenu bon tout son externat, sans céder aux alléchantes propositions qu’elle a forcément reçues… C’est vraiment admirable, je ne sais pas si j’aurais eu autant la tête fermement campée sur les épaules à sa place. Clap clap clap de circonstance 😉

Il y a 4 ans, Thoracotomie publiait ses 10 commandements et je plagiais Rudyard Kipling dans le seul billet en vers de ce blog (heureusement, diront certains :D).

Ces conseils généraux sont toujours d’actualité, bien sûr… Mais il y en a dix autres que je peux proposer :

  1. Choisir le bon stage… C’était la crainte (légitime !) de Marine Lorphelin. En général, les associations d’internes tiennent une liste des lieux de stage et des évaluations des internes qui y sont passés… On peut également regarder les stages qui sont habituellement disponibles pour les internes de premier semestre (… ce qui a pu évoluer depuis la réforme de l’an dernier) et contacter ceux qui sont en poste dans les services qui nous intéressent. Enfin, il n’y a pas de bons ou de mauvais stages, moi si je devais résumer mes stages avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres, des gens qui m’ont tendu la main… 
  2. Savoir rapidement faire face à la plupart des situations : utiliser le site ou l’app Vidal Recos (pour moi c’est pluri-quotidien – et je n’ai pas de conflit d’intérêt pour vous le recommander ^^)
  3. Bien décider en consultation : le Dr Michel Arnould regroupe sur cette page plein d’éléments, notamment sur l’administratif, les outils utiles et – surtout – une liste (à jour) de sites utiles, tels qu’AntibioClic, GestaClic, VIHClic, DémenceClic, Aporose… Parcourez ces différents sites, vous allez rapidement voir comment ils vous simplifieront la vie au quotidien !
  4. Rester à jour : suivre le #DragiWebdo de @Dr_Agibus (qui fêtera son 200ème numéro ce dimanche !) C’est un travail formidable de veille, qui relève de la fiction pour la plupart des humains normaux ! Il y a évidemment plein d’autres solutions :
    • avoir un compte Twitter (vraiment !),
    • s’abonner à des revues (classiquement Prescrire, Exercer, la Revue du Praticien…) – j’avoue misérablement ne plus être abonné et lire « simplement » ce qui m’intéresse en cherchant moi-même,
    • acheter des bouquins (l’ECG facile, l’examen neurologique facile, Vertiges… tiens ou bientôt la 7ème édition de Médicaments ECNi *sifflote* :D)
  5. Apprendre de ses erreurs. Je vous invite à noter quelque part ce que vous considérez comme des erreurs, pour essayer de comprendre ce qui n’a pas été, et ce que vous auriez pu faire mieux. C’est la réflexivité si on veut dire un gros mot. Mais c’est important pour progresser, et s’en souvenir réellement (plutôt qu’avoir une vague culpabilité sur quelque chose que vous auriez « moins » mal fait que votre esprit torturé voudrait vous le faire croire)… En plus, vous verrez que des vraies erreurs, vous n’en faites pas tant que ça 😉
  6. Apprendre RAPIDEMENT à faire des recherches bibliographiques (et utiliser Zotero) : ça vous sera utile pour la thèse, mais aussi pour vos RSCA, et finalement pour votre quotidien… J’ai fait un billet sur la thèse (si vous voulez, je pourrai la mettre à jour bientôt), et dans un récent post sur le changement d’heure, un rappel sur PubMed et LiSSa. Il y a beaucoup d’autres sources ailleurs plus fournies : le site LEPCAM de @NdeChanaud, ou les vidéos Doctobib qui montre comment bien utiliser Zotero et faire une recherche bibliographique.
  7. Comprendre ce qui se dit lors des enseignements/groupes d’échanges de pratiques de médecine générale : parfois, ça peut être un peu difficile de parler tous le même langage, alors j’ai rappelé ici les principaux concepts utilisés en médecine générale, issus de la thèse de Marie-Alice Bousquet.
  8. Préparer un avenir plaisant. L’internat ne dure « que » 3 ans mais peut sembler long (d’ailleurs je crois qu’il m’a semblé plus long que mes 4 ans d’installation). Il n’est jamais trop tard pour changer ensuite de spécialité (droit au remord), de mode d’exercice… C’est l’occasion d’explorer, faire des DU, faire un peu d’enseignement, de recherche, de remplacer à la ville, à la campagne, rencontrer des gens qui font de l’échographie, des polygraphies, des ECG…
  9. Se positionner sur un clinicat de médecine générale rapidement, si l’enseignement et/ou la recherche vous intéresse. J’ai fait le bilan du mien quelque part par là ; tous les profils existent, mais le message est de ne pas attendre la fin des 3 ans pour s’y intéresser.
  10. Prendre du temps pour soi, ses amis et la non-médecine. Eh, les ECN sont derrière ! Il ne peut plus rien nous arriver d’affreux, maintenant. Et si ça ne va pas, parlez-en… Il y a trop d’internes qui se font du mal, souvent à cause de gens maltraitants (volontairement ou non). Tout ça n’en vaut pas la peine, surtout qu’il y a plein de voies de sorties, même si ce que vous faites ne vous plait pas ou plus. Vous avez 6 ans de médecine derrière vous, vous pouvez faire ce qui vous plait, que ce soit dans la médecine (Michel Cymes, Jean-Yves Nau, et plein de chroniqueurs radio ou télé), la littérature (Christian Lehmann, Jaddo…), le cinéma (Thomas Lilti), le one-man show (le sympathique Aviscène, rencontré la semaine dernière ;-)), les chaînes YouTube de vulgarisation (Asclépios, Primum non nocere, WhyDoc, à retrouver dans cette liste de vulgarisateurs par @stdebove), le YouTube hors médecine avec les jeux vidéo (@rifampicine), le sport ou encore… le mannequinat (Marine Lorphelin) ! La boucle est bouclée 😀

Amusez-vous bien ! 😉

 

EDITION JUIN 2019 : Il y a aussi le kit médical, et EBMFrance

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Journées régionales de médecine 2018 : quelques résumés…

Vendredi 5 et samedi 6 octobre avaient lieu les Journées Régionales de Médecine (JRM). Elles étaient dédiées au Dr Claude Hossein-Foucher.

Ces 1,5 jours étaient intéressants et nous avons fait quelques fils Twitter, que je replace ici (cliquez sur le premier tweet, et vous pourrez voir la suite si le sujet vous intéresse).

1/ Douleur chronique non cancéreuse : où on parle de vocabulaire à utiliser et de douleurs neuropathiques.

2/ HTA, une cible thérapeutique personnalisée. Session que j’ai eu le plaisir de présenter, avec le Dr Guillaume Ledieu (cardiologue) et le Dr François Provot (néphrologue). Je vous ferai un billet là-dessus prochainement sans doute 🙂

3/ Comment aborder les questions d’addiction avec les adolescents ? Où on parle de recherche d’identité de l’adolescent et test de ses limites.

4/ Quand poursuivre une anticoagulation au long cours après une maladie thromboembolique veineuse ?

5/ Quoi de neuf (la moitié de 18) en diabétologie en 2018 (le double de 9) ? Où on aborde les nouveaux capteurs, les nouveaux traitements à venir et ceux à oublier.

6/ Conduite à tenir devant une hyperferritinémie ? L’occasion de rappeler mon billet sur le sujet de l’hiver dernier…

7/ Maladie de Lyme : mythes et réalités… Une première présentation polémique où on rappelle que les tests biologiques sont de piètre qualité.

8/ L’affaire Levothyrox… une deuxième présentation polémique, non reproduite ici. Mais c’est l’occasion de rappeler ici aussi un précédent billet en plein coeur de « l’affaire ».

9/ 3 thèses de médecine générale en 20 minutes. On y constate que les femmes enceintes connaissent bien la toxoplasmose, que les enfants ne doivent pas se servir seul et/ou hors repas, et que les médecins évaluent pas mal le risque hémorragique quand ils prescrivent des anticoagulants.

10/ Gros thread sur la pathologie du runner en ville : on y parle syndrome des loges chroniques, périostite, fracture de fatigue, tendinite du tendon rotulien et du tendon d’Achille, conflit fémoro-acétabulaie.

11/ Cultures différentes et éducations des enfants : partage d’expériences. On y parle traditions, croyances et confrontation avec le monde médical.

12/ L’enfant dyslexique sévère. On y parle de la place du médecin parmi les différents partenaires sociaux, paramédicaux, administratifs…

13/ Traumatismes du poignet. Où on évoque luxation péri-lunarienne, entorse scapho-lunaire (SLAC wrist), fracture du scaphoïde (SNAC wrist), lésion du TFCC, entorse de la MCP du pouce, rupture de la plaque palmaire, mallet finger, jersey finger !

Voilà ! Si les thématiques vous ont intéressé et que vous êtes un professionnel de santé (en formation initiale ou continue), n’hésitez pas à venir l’an prochain. Dès que nous aurons la date (courant février), je referai un billet de rappel 🙂

(J’en profite pour rappeler cette technique sur Twitter… comme ça je saurai retrouver comment faire moi-même ^^)

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Manger des bananes en courant, est-ce bon pour les crampes ?

Samedi 22 septembre… Pour la quinzième fois, j’essuie mes lunettes piquetées de gouttes. Tout en courant, je regarde ma montre : 24 kilomètres, 500 mètres de dénivelé positif, et 3 heures. Dans 6 kilomètres, c’en sera fini du Trail des 3 forts ! Mais ces 6 kilomètres là sont prévus pour casser des jambes : 180 mètres de dénivelé positif, passant tantôt au-dessus et tantôt au pied de la falaise, autant de fois qu’il y a d’escaliers nous autorisant ces extravagances !

Trail des 3 Forts, 2ème édition (30 km) : Le Portel Plage à Hardelot Plage

Mon mollet gauche me fait souffrir. Il y a quelques kilomètres, c’était le mollet droit qui m’obligeait à interrompre 2 minutes ma course, le temps de quelques étirements sur un grand bac à fleurs de ville… La pluie, le vent, les efforts pour dégager son pied du sable fin, le dénivelé : tout ça semble concourir à faire souffrir les coureurs.

Au précédent ravitaillement, 1 kilomètre plus tôt, il y avait des bananes, du chocolat noir, du raisin sec, de l’eau et du coca… Refaire le plein de potassium, magnésium et eau, c’est important, il parait. Et puis les muscles ont besoin de glucose pour bien fonctionner. Ma moyenne de course a bien baissé depuis le 20ème kilo…

– « Vous avez des crampes ? » me demande une coureuse en me dépassant, après avoir finement analysé ma démarche à la Long John Silver. « Tenez ! Avec ça, ça va aller mieux. Il faut le faire fondre sous la langue… ».

Elle me donne un comprimé blanc. Ca pourrait être n’importe quoi, si on me promet que ça fait disparaître les crampes, JE. LE. PRENDS. Je lis quand même le nom de la boîte : SPORTENINE. Je crois me souvenir (pour l’avoir vu sur le GR20…) qu’il s’agit d’homéopathie. Mais je veux quand même y croire : c’est peut-être un vrai médicament, pas un truc dilué… Ca a un goût un peu citronné, sous la langue, c’est pas mauvais… C’est sûrement riche en magnésium, me dis-je en avançant vers la prochaine montée. Ca ne va pas forcément mieux, mais ça n’est pas pire sur un terrain plat…

Et puis viens la montée suivante, et le retour des douleurs dans l’ensemble de la jambe, comme des promesses d’une future crampe.

Mais, me dis-je, en appuyant sur mes genoux le temps de cette effroyable montée, qu’est-ce qu’une crampe ?

Une crampe, c’est une contraction du muscle strié, involontaire, brutale (contrairement aux dystonies qui sont lentes), douloureuse (contrairement aux spasmes), temporaire (contrairement au tétanos), sans pathologie métabolique, endocrinienne ou neurologique (neuropathie, fasciculations, cirrhose, hyponatrémie, hypokaliémie, diabète…) [1][2]. Les crampes surviennent souvent pendant ou après un effort d’endurance, avec contraction du muscle en position raccourcie (quand l’organe tendineux de Golgi est moins « inhibiteur » et que les plaques motrices sont plus excitables) [1]. L’étirement peut la faire passer rapidement ; si les crampes disparaissent en général en quelques secondes ou minutes, de rares cas de crampes durant plus de 8 heures ont été rapportés ! [2]

L’organe tendineux de Golgi joue un rôle important dans les crampes. Parlons-en un peu ici ! Il s’agit de fibres de collagène et musculaires, situées dans la jonction musculo-tendineuse (et non dans le tendon). Quand le muscle se contracte, les terminaisons nerveuses sont stimulées (fibre Ib) et viennent réguler, par le réflexe myotatique inverse, la force de contraction au niveau du motoneurone alpha. L’organe tendineux de Golgi est là pour protéger le muscle des folies de leur propriétaire. Anatomie Lyon 3D propose une vidéo claire sur le sujet…


Me voici enfin en haut de cette longue montée… Il n’y a plus qu’à rejoindre l’arrivée et ça ser… Argh, non ! On ne va pas refaire le sentier des Douaniers dans l’autre sens ?!

Le temps que je monte et descende les falaises, émettant quelques cris tribaux ici ou là, revenons aux crampes, et plus particulièrement aux crampes musculaires associées aux exercices (CMAE)…

Les CMAE ont été décrites en 1908, chez des mineurs travaillant en milieu chaud et humide [2]. Ca a donné lieu à ce qu’on peut appeler la  « vieille » théorie de déplétion hydro-électrolytique (1935 [2][4]). Par la transpiration, il y aurait une perte d’eau et de différents ions (sodium, magnésium, calcium, chlore, potassium). Cet « assèchement » diminuerait le volume interstitiel (le liquide entre les capillaires et les cellules, où se font les échanges nutriments / déchets). Ainsi, les terminaisons motrices seraient excitées par les modifications de concentrations ioniques et par l’augmentation de pression par perte du liquide interstitiel, le tout causant des décharges spontanées (crampes) [1].

Or, dès 1986, des études ont montré qu’il n’y avait pas de lien entre crampes et concentrations ioniques ou crampes hydratation avant/après course ; une revue de littérature de 4 articles confirmait ce résultat [5]. Par ailleurs, l’étirement musculaire ne change rien aux concentrations ioniques, et cette théorie n’explique pas pourquoi des troubles ioniques diffus n’entraînent pas des crampes sur tous les muscles (face, cou, bras, tronc…), mais seulement dans les jambes pour les coureurs [2].

Néanmoins, même si cette théorie semble en passe d’être remplacée, il reste recommandé aux sportifs de bien s’hydrater et prendre une supplémentation en magnésium et composés salins – notamment parce que les crampes ne sont pas les seuls problèmes dans les efforts soutenus (c’est pour ça qu’on trouve quand même des bananes, fruits secs et des carrés de chocolat noir aux ravitaillements…) [1]. Enfin, soyons bien clair : des troubles ioniques peuvent entraîner des crampes (c’est un des symptômes des hyponatrémies ou hypokaliémies…) mais la plupart du temps, les crampes chez les sportifs (CMAE) surviennent indépendamment de ces troubles ioniques.

La « nouvelle » théorie (1997 [1][2][3][4]) est celle du contrôle neuromusculaire altéré par la fatigue… Au fil de l’épreuve, la fatigue musculaire se développe en raison de l’exercice répétitif du muscle (dans de mauvaises conditions détaillées plus bas)… La fatigue musculaire s’associe à une augmentation des afférences excitatrices vers le motoneurone alpha et une diminution des afférences inhibitrices (organe tendineux de Golgi), donc à une augmentation de l’activité du motoneurone alpha, qui contracte le muscle sans retenue jusqu’à la crampe… L’étirement passif restaure l’inhibition « protectrice » par l’organe tendineux de Golgi. Cette nouvelle théorie est davantage étayée sur le plan scientifique, avec des modèles animaux montrant la diminution de l’inhibition au fil de l’exercice ou avec les contractions musculaires en position raccourcie [1][2][3].

Les facteurs de risques des crampes sont assez bien connus [1][2][3] :

  • un conditionnement inadéquat,
  • une augmentation de la durée ou de l’intensité de l’exercice (un trail par rapport à une course sur route donc…)
  • une contraction répétée du muscle en position raccourcie (le dénivelé positif…)
  • une diminution des réserves énergétiques du muscle,
  • le sexe masculin (plus de fibres musculaires à contraction rapide, plus fatigables),
  • l’antécédent personnel de crampes (seuil de crampes plus bas),
  • être grand (pas de lien avec l’IMC par contre),
  • des conditions chaudes ou humides (ce qui se vérifie bien aujourd’hui pour l’humidité – seizième essuyage de lunettes).

Il n’y a pas de lien clairement montré entre âge et crampes.

Une analyse chez des marathoniens trouvait une prévalence de 1,2 cas pour 1000 participants ; une autre analyse trouvait 1/526 coureurs de plus de 42 km… Ca me semble sous-évalué ou en tout cas, très dépendant des conditions (parce que sur le trail de 30 km d’où je vous parle, à peu près 30 à 50 % des coureurs semblent s’en plaindre !) [1][2][3].

Pour prévenir les crampes, plusieurs moyens ont été proposés [1][3] :

  • Conditionnement… plus on est préparé à l’effort, moins on en souffre,
  • Déclenchement de crampes par stimulation électrique, sur un muscle en position raccourcie (rééquilibration des afférences excitatrices et inhibitrices, et augmentation du seuil de survenue des crampes) : c’est bien, mais se déclencher des crampes, c’est douloureux…

Et puis il y a tout le reste, qui est utilisé empiriquement mais pour lesquels on n’a pas de preuve d’efficacité : s’échauffer, diminuer le volume et l’intensité avant la compétition, commencer la compétition « à bas régime », faire des étirements, marcher pendant la compétition, se masser avant l’effort, mettre des vêtements de compression ou du taping, faire des exercices pliométriques… Par exemple, pour la compression et le taping (très à la mode), une étude sur 6 triathlètes ayant eu un kinésio-taping des mollets n’ont pas souffert de crampe à cet endroit, mais 2 ont eu des crampes des quadriceps [3]. Il y a donc quelques petites études, qui relèvent plus de l’anecdote qu’autre chose à l’heure actuelle.

Pour traiter les crampes, il existe une seule méthode fiable : l’étirement passif prolongé à pleine longueur. L’augmentation de la tension au niveau de l’organe tendineux de Golgi augmente l’inhibition réflexe, restaurant la balance entre impulsions excitatrices et inhibitrices. Un repos et un temps de récupération suffisants sont importants, pour éviter la récidive rapide de la crampe. Je peux vous le confirmer : s’arrêter 30 secondes, et repartir avec une crampe pas encore complètement partie, sous prétexte qu’on vient de se faire doubler par plein d’autres coureurs, c’est une mauvaise idée… Il faut mieux perdre 2 minutes et repartir dans de meilleures conditions !

Deux autres solutions sont proposées, à partir de séries sur 3 à 12 personnes [1][3] : 1/ boire 30 à 60 ml de jus de cornichon, 2/ hyperventiler (20 à 30 mouvements par minute). Pour le premier, les composés salins et l’acide acétique du jus de cornichon augmenteraient l’action inhibitrice des neurotransmetteurs ; pour le second, l’hyperventilation entraîne une acidose respiratoire qui aurait le même effet… Quant aux boissons de réhydratation, liquides riches en électrolytes… on ne sait pas si ça fonctionne.

De façon anecdotique, la prise de baclofène, diazépam, gabapentine ou quinine pourraient diminuer la fréquence des crampes, mais avec un niveau de preuve faible (au mieux) et un bénéfice insuffisant pour justifier la prise avant une course [1][3].

Ca y est… la course s’achève ! Ma Chérie vient me retrouver à 1,5 kilomètres de l’arrivée (elle a couru le 15 kilomètres). Je découvre que la course ne fait pas 30 km comme annoncé, mais plutôt 31… (l’occasion rêvée d’un lien vers une vieille fiche annonce d’une mauvaise nouvelle). Après un dernier petit faux plat, nous entrons dans le stade. Ma Chérie me pousse à accélérer à la toute fin… Je franchis la ligne, 4 heures et 2 minutes après le départ. Après 3 pas chancelant, une nouvelle crampe me prend dans le mollet droit.

J’en conclus 2 choses. Primo, augmenter l’intensité de l’exercice a fait son rôle : je passe 2 minutes au sol à supplier ma Chérie d’étirer mes organes tendineux de Golgi. (C’est pas ce que vous croyez). Secundo, la sporténine (et l’homéopathie puisque c’en est), ça n’est pas si efficace qu’on veut nous le faire croire. Aïe.

Dénivelé et dérouillée

Références

Recherche Lissa : crampes musculaires ; recherche PubMed : muscle cramps exercice (5 ans, reviews) 

[1]            Laurent C, Laurent L, Kaux J-F. Les crampes musculaires associées aux exercices (CMAE) : revue de littérature. J Traumatol Sport 2018;35:115–9. doi:10.1016/j.jts.2018.04.002.

[2]            Giuriato G, Pedrinolla A, Schena F, Venturelli M. Muscle cramps: A comparison of the two-leading hypothesis. J Electromyogr Kinesiol Off J Int Soc Electrophysiol Kinesiol 2018;41:89–95. doi:10.1016/j.jelekin.2018.05.006.

[3]            Nelson NL, Churilla JR. A narrative review of exercise-associated muscle cramps: Factors that contribute to neuromuscular fatigue and management implications. Muscle Nerve 2016;54:177–85. doi:10.1002/mus.25176.

[4]            Jahic D, Begic E. Exercise-Associated Muscle Cramp-Doubts About the Cause. Mater Socio-Medica 2018;30:67–9. doi:10.5455/msm.2018.30.67-69.

[5]            Murray D, Miller KC, Edwards JE. Does a Reduction in Serum Sodium Concentration or Serum Potassium Concentration Increase the Prevalence of Exercise-Associated Muscle Cramps? J Sport Rehabil 2016;25:301–4. doi:10-1123/jsr.2014-0293.

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Un jour, au bac philo, on a demandé « Qu’est-ce qu’une expression vidée de son sens ? », j’ai répondu…

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https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/ma_sante_2022_pages_vdef_.pdf (on en parle ici…)

 

Et j’ai eu 20. 

\o/

 

Requêtes Google : « patient au centre » site:https://solidarites-sante.gouv.fr et site:http://www.has-sante.fr

Inspirations de ce billet…

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#PlanSante2022 : numerus clausus, CPTS et assistants médicaux

Le 18 septembre (hier), le président, la ministre de la santé et la ministre de l’enseignement supérieur ont présenté le Plan Santé 2022. Ca m’a agacé, et j’ai (trop) tweeté sur le sujet. Ca m’a gâché une pièce de théâtre qui me donnait envie à la télé. Ca m’a agacé toute la matinée, alors plutôt que continuer à m’agacer sur un réseau social par petites touches, je vais m’agacer ici de façon plus claire et longue, et comme ça, je pourrai complètement passer à autre chose.

Prêts ? Allons-y pour un petit résumé bref et partial :

  • actuellement, il y a 224 000 médecins dont 106 000 en ville (dont 60 000 généralistes), dont certains sont dans 1000 maisons de santé et 2000 centres de santé (dixit le rapport).
  • selon le résumé (page 10), le système est inadapté car il ne répond pas aux attentes des patients, nourrit le mécontentement des professionnels de santé, et confronte l’état/l’assurance maladie à des tensions financières. Il n’y est pas question de qualité des soins dans les problématiques (peut-être en partie parce qu’objectivement, les soins en France sont de qualité).
  • les premières solutions proposées : faire de la certification qualité et décloisonner avec du lien ville-hôpital. Ca ne répond déjà à aucune des problématiques sus-cités, c’est bien fait comme rapport.
  • supprimer le numerus clausus… vous voyez mon billet sur la suppression des ECNi ? Bah c’est pareil. C’est une mesure populaire car tout le monde (moi le premier) déteste la P1/PACES : tous ceux qui y sont passés, tous ceux qui l’ont obtenue, tous ceux qui ont été recalés, et à peu près toutes les familles de toutes ces personnes… On perd un concours destructeur, détestable, aliénant mais équitable (QCMs anonymes)… qu’allons-nous gagner ? A priori une sélection sur 3 ans, avec probablement une sélection drastique quand même (parce que les facs qui sont déjà pleines d’étudiants ne vont pas pouvoir subitement augmenter le nombre de reçus : comme dit le président de l’Ordre, « il ne faut pas aveugler les étudiants »…) La vraie différence c’est que la faute sera jetée localement sur les facs au lieu d’être rejetée plus haut, sur le numerus clausus. Après le merveilleux changement APB -> ParcoursSup, vivement le passage PACES -> SélectionSup, ça va faire remonter le cours du pop-corn.
  • Notons que cette mesure est assortie ici d’un magnifique mensonge (page 15) : « à plus long terme, effets de la RÉFORME DU NUMERUS CLAUSUS ». C’est non. L’effet qu’on va voir sera dû à la remontée du numerus clausus à partir de 2004 environ, où il est passé du simple au double ; ça a été fait trop tardivement, d’où une démographie médicale en berne pour les 15 ans encore à venir. Mais ça ira mieux ensuite par ce qui a été fait à l’époque de Jacques Chirac (!) ; les actions sur le NC aujourd’hui sont inutiles pour la démographie médicale.

Quelques preuves visuelles : 

D'après Alternatives Economiques : le creux du numerus clausus se décale de 10 ans (durée de formation), donc nous sommes dedans jusqu'en 2030.

D’après Alternatives Economiques : le creux du numerus clausus a entraîné la pénurie de médecins. Et rien d’autre. Calculer des ETP sur des histoires de 2 patients qui ne viennent pas au rendez-vous, c’est parler de la présence de pissenlits dans une pelouse qu’on vient de traverser avec un tractopelle.

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D’après le rapport DREES, le creux est prévu (au moins) jusqu’en 2033… à noter qu’on mélange ici tout médecin, pas seulement les généralistes (et sans tenir compte des généralistes qui s’orientent vers des exercices particuliers comme l’acupuncture etc.)

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Et parallèlement, la population vieillissante va demander de plus en plus de soins…

(Merci à @turbuha1 pour ces deux dernières sources). 

  • mesurer la satisfaction des patients… J’espère qu’à ce stade, quand on voit les courbes ci-dessus, on se rend bien compte de l’inanité de cette mesure. Je sais que le monde est aujourd’hui gouverné par les « questionnaires de satisfaction » mais franchement, quel est l’objectif de cette mesure ? Suivre la satisfaction des patients, pour chercher ensuite à l’augmenter ? S’ils sont mécontents parce qu’on refuse des antibios sur une rhino ou parce qu’on prescrit du Sterimar non remboursé au lieu du Pivalone (corticoïdes) remboursé, on fait quoi : on change nos pratiques au nom du sacro-saint indicateur ? A part nous inciter à devenir des distributeurs pour avoir une bonne note, je ne comprends pas l’objectif derrière cette mesure. Ca doit être une de ces #PenséesComplexes.
  • créer un espace santé pour tous les patients, avec notamment les vaccins. C’est très très bien ! Bon, alors évidemment, ça va nous obliger à prendre des notes dans ce nouvel outil, EN PLUS du DMP (ahah), du carnet de santé papier (parce que les 2 co-existeront de longues années) et de notre dossier personnel (j’ai déjà dit pourquoi le DMP c’était pas tellement faisable à mon sens, tant que ça n’est pas fiable, couplé à un vrai logiciel de prescription, couplé à notre comptabilité…).
  • lancer les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). En gros c’est ce qui existe déjà naturellement, mais en ajoutant des réunions pour organiser les prochaines réunions (rhooooo, comment je suis mauvaise langue) (mais bon, c’est quand même un peu vrai). L’une des missions va par exemple être de savoir comment limiter l’accès aux urgences pour les soins non urgents. C’est sûr qu’une bonne réunion, ça devrait régler rapidement le problème.
  • on ne le dit jamais assez mais pour augmenter le temps de soins, il faut bah… augmenter le temps de soins. Faire des réunions n’augmente pas le temps de soin, elle le réduit. On ne veut pas de télémédecine, pas de droit de pub, pas de réunions obligatoires.

  • dans le développement du numérique, il y a aussi la notion de prendre les rendez-vous en ligne uniquement, avec une assertion sortie de nulle part comme quoi les plateformes limiteraient de 2 à 5 fois les lapins… (je n’imagine même pas les conflits qu’il peut y avoir avec des grosses boîtes telles que Doctolib pour récupérer des données médicales coûte que coûte).  Le tout avec des calculs fumeux qui sortent un 100 millions du chapeau (430 lapins par an par médecin, soit 10 par semaine !), puis disent qu‘un équivalent temps plein de médecin, c’est 2700 consultations par an au lieu de 3900 en moyenne, tout spécialiste confondu ! Jugez vous mêmes… (psst, pour ceux qui me lisent sur Twitter, je m’étais trompé de paragraphe, j’avais fait le calcul avec les 2000 ETP « sauvés » grâce aux assistants dont on parle plus bas -_- Mea culpa.)
100 M de RDV non honorés, soit 25 M d'heures (à 15 min le rendez-vous). Si 37 000 ETP = 25 M d'heures, alors 1 ETP = 676 heures de travail par an, soit 19 semaines de 35h.

Si 100 M de RDV non honorés = 37 000 ETP, alors 1 ETP = 2700 consultations par an (la moyenne étant à 3900), soit un médecin bossant 30 % de moins que la moyenne quoi. Ca semble arranger un peu les calculs, alors on va pas s’embêter.

  • Quant à l’identifiant unique qui a pour but de blacklister partout les patients qui ne se présentent pas aux rendez-vous, sans tenir compte de leur parcours ou leurs arguments, c’est hautement méprisable (j’ai en tête un patient ayant une dépendance à l’alcool qui me demandait des RDV qu’il n’honorait, parce qu’il reportait le moment de son sevrage…).
  • juste pour l’anecdote : je suis en cabinet seul, sans secrétariat présentiel, téléphonique ou en ligne, c’est-à-dire que je réponds à tous les appels. Je reçois 120 appels de 30 secondes à 1 minute en moyenne par semaine, soit 1 à 2h au total. Les plus longs échanges sont avec les pharmacies ou EHPAD que j’aurais de toute façon. Et j’ai 0 à 2 lapins par semaine les pires semaines. Une prise de RDV en ligne me permettrait d’augmenter mon nombre de patients (ce que je ne veux pas) et mon nombre de lapins, c’est sûr (je peux difficilement faire moins). Peut-être que ce « facteur 2 à 5 » correspond à des RDV pris chez des spécialistes qui donnent uniquement des rendez-vous à 3 ou 6 mois.
  • les infirmiers de parcours avancé et les projets hospitaliers… ça me concerne moins, je ne détaille pas.
  • et enfin, créer 4000 postes d’assistants médicaux… Alors, ça c’est sous conditions bien sûr.
Projet et conditions de vente

Projet et conditions de vente des assistants. On note que cette fois ils vont libérer 2000 ETP de temps médical, pour 4000 structures. Si 1 ETP = 676 heures, ça va libérer 338 heures par an pour ces structures ?

Donc je résume : si un médecin est inscrit dans un CPTS (= faire des réunions), exerce dans un cabinet d’au moins 3 médecins, il aura un financement pour pouvoir augmenter le nombre de patients suivis (on sait déjà que le financement sera temporaire, et sera remplacé ensuite par les « patients gagnés »).

La mesure prévoit de faire gagner l’équivalent de 2 000 ETP de temps médical (sur 106 000 médecins, soit 2 %, et uniquement dans les zones sous-dotées mais suffisamment grandes pour avoir 3 médecins sous le même toit – donc pas les campagnes a priori). Il faudra aussi définir ETP, parce qu’en l’état, c’est légèrement problématique, si 1 ETP = 676 heures de travail effectif (2 ministères et le Président qui signent ce rapport, quand même, et personne qui refait le calcul de 100 millions de rendez-vous / 37000 ETP = 2700 RDV/an au lieu des 3800 en moyenne).

Enfin, ces assistants médicaux vont avoir des tâches qui ont été définies par des politiques. C’est dommage, parce qu’il n’y a pas longtemps, j’ai publié un article dans la revue d’épidémiologie de santé publique (version intégrale ici) sur les préférences des médecins généralistes libéraux en France métropolitaine quant à la délégation des tâches médico-administratives aux secrétaires assistant(e)s médico-social(e)s. Et ce que veulent les médecins c’est ça, dans l’ordre :

Par ordre décroissant de préférence : gestion du planning, des dossiers, de la comptabilité, entretien du cabinet, prise d'initiative, avoir une formation spécifique...

Par ordre décroissant de préférence : gestion du planning, des dossiers, de la comptabilité, entretien du cabinet, prise d’initiative, avoir une formation spécifique…

L’aide logistique – soit l’argument de vente principal du rapport (prendre les constantes, etc.) – était le dernier truc cité pour la plupart des médecins. Ca ne les intéresse pas d’avoir quelqu’un pour de la logistique comme ça… Drôle, non ? Ca s’appelle la science, et c’est vachement bien pour déterminer les mesures qui sont réclamées par les médecins 😉 

Aaaaaah.

Ca va mieux.

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