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Avis commenté sur les voeux du Président aux soignants

Le 6 janvier 2023, le Président Emmanuel Macron a présenté de façon unilatérale ses voeux pour la santé en France. En voici une petite lecture rapide avec des extraits choisis.

  • « Après deux années de Covid, après une série d’épidémies qui se sont accumulées ces dernières semaines, vous continuez de tenir bon » : en rendant le masque obligatoire dans les transports et les lieux clos, il était possible d’amortir l’impact de ces épidémies fin 2022 et début 2023 pour celles à venir… Y’a un côté pompier pyromane dans cette intro.
Thread sourcé sur pourquoi il fallait remettre le masque en lieu clos
  • « …de passer d’une crise à l’autre, et alors qu’on venait même de sortir du Covid, de réaffronter des crises à nouveau et de ne jamais sortir en quelque sorte de ce jour de crise sans fin… » : la crise du COVID n’est évidemment pas terminée ; le problème est JUSTEMENT le manque de perspective, c’est-à-dire le manque de seuils (à partir de quand on remet les masques ? à partir de quand on réincite au télétravail ? etc.)
  •  » Et je pense que les 35 h ont profondément perturbé l’hôpital » : toujours le même discours répété depuis des années, déjà débunké ici (un rapport de 2007 avait par exemple montré que 40 % des établissements n’avaient pas changé, et que les autres avaient restreint à 37h30, avec des RTT non pris et stockés sur des compte épargne-temps…). D’ailleurs, le PR débunke lui-même ensuite : « le système ne marche que par des heures supp qui sont allouées de manière complètement hétérogène selon les services. Cela ne crée pas une bonne collaboration entre les services et cela a créé aussi beaucoup d’hétérogénéité selon les territoires, les spécialités, les services parce qu’il y a des heures supp qui sont vraiment payées, il y a des heures supp qu’on met sur des comptes qui ne sont pas payées tout de suite, qui créent beaucoup de différences malgré toutes les revalorisations et le Ségur qu’on a fait, aux heures payées, à la contrainte demandée« .
  • « on a un cloisonnement ville-hôpital qui s’est installé, qui vient de très loin, qui est culturel, mais qui est là avec insuffisamment de coopération » : faudra un jour arrêter avec ce mythe… Le lien ville-hôpital est une thématique de recherche pour toujours améliorer notre collaboration, mais en pratique cette collaboration étroite existe déjà ! S’il y a quelques soucis mineurs qui nous font râler, dans l’ensemble pour les patients ça fonctionne très bien… Parler de « cloisonnement », faut quand même être sacrément déconnecté (en même temps, Emmanuel Macron n’est pas lui-même usager du système de santé traditionnel…)
  • « que ce soit le médecin de ville ou de campagne s’en va à la retraite, celui qui lui succède n’a pas envie d’avoir le même rythme, et on ne remplace pas un pour un » : c’est une généralité, pas toujours vraie et qui stigmatise comme toujours les jeunes médecins face au « bon vieux médecin des campagnes »… Il y a des médecins de 60 ans qui sont à 800 patients en médecin traitant et des gens de 35 ans qui sont à 1500. Parfois on remplace un pour un, parfois non… (Par ailleurs, avec le vieillissement de la population, nous avons de plus en plus de consultations complexes par jour, comme le souligne justement le PR : « En parallèle de cette évolution que je décris là à la cavalcade, il se trouve que nous sommes un pays qui vieillit, c’est une chance »)
  • « Alors une fois que j’ai dit ça, le grand problème, c’est que la réponse n’est pas simplement plus de moyens. » : euh, si. Et plus de moyens, ça passe aussi par plus de temps libéré par une action politique. Ca tombe bien, c’est le sujet de notre tribune publiée dans l’Express le 5 janvier et d’une précédente en janvier 2022 dans Le Figaro…
Tribune dans l’Express (janvier 2023)
Tribune dans le Figaro (janvier 2022)
(Et on peut remonter en 2020… toujours les mêmes idées)
  • « Et donc, il n’y a pas de recette miracle qui va dire : en un seul coup, on va vous créer une offre de santé formidable pour répondre à ce qu’on a, aux erreurs du passé ou à la mauvaise programmation et à cette société qui change. » : si, il y a des recettes miracles, mais c’est plus pratique de faire croire que non évidemment, quand on est Président de la République :
    • Libérer du temps aux médecins par de simples modifications législatives (notamment disparition des certificats absence enfant malade et arrêts de travail de moins de 3 jours au profit d’auto-déclarations par les patients),
    • Faire de la pédagogie médicale à large échelle (les viroses, les troubles musculosquelettiques dont lombalgie, épicondylite sont parmi nos consultations les plus fréquentes),
    • Faire de la délégation de tâches,
    • Former de nouveaux professionnels de santé (aide-soignants, auxiliaires de vie, IDE, IPA, kiné… pas seulement médecins) ET recruter des enseignants pour former ces professionnels et donner des moyens aux universités…
    • Passer à la Grande Sécu (comme recommandé dans le scénario 3 du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie en janvier 2022), afin d’améliorer l’accès aux soins des personnes les plus précaires, faire des économies permettant de financer d’autres actions de prévention (remboursement des diététiciens, psychologues, de l’activité physique adaptée…)
    • … Ca fait 6 ans que ça aurait pu être commencé pour de vrai… Les solutions proposées aujourd’hui sont : « on va demander aux médecins surchargés d’animer des CPTS mais on ne fera pas de pédagogie médicale à large échelle, pas de libération de temps médical… »
  • « Pour la première fois, vous avez un ministre de la Prévention et de la Santé. » : oui, sauf que François Braun a toujours eu la main qui tremblait lorsqu’il s’agissait de PRÉVENIR les viroses respiratoires, préférant se déplacer avec sa faux sur l’épaule d’hôpital en hôpital pour constater les effets de son inaction sur la saturation des hôpitaux par des viroses respiratoires. On n’est pas là pour faire du marketing mais pour améliorer la santé des gens, merci de rester focus sur l’objectif.
  • « On a investi 19 milliards d’euros dans notre système de santé avec le Ségur et en particulier sur l’hôpital, pour des très bonnes raisons, parce que c’est vers l’hôpital que refluent toutes les difficultés, ce qui est encore le cas et ce que vous vivez. » : oui, le fameux Ségur qui fait qu’un jeune praticien de 2019 sera mieux payé toute sa carrière qu’un praticien arrivé en 2015… Belle réussite.
Le Ségur de la Santé : petit scandale passé inaperçu.
  • « Et puis, on a mis fin au numerus clausus dans ces années dernières. Depuis 20 ans, je le disais, on ne formait pas assez de soignants et on a mis fin parce que je veux ici rappeler les chiffres (…) Je le dis juste, mais malgré l’ouverture du numerus clausus, ce qu’on a fait ces dernières années, on n’en verra pas le résultat dans les 5/8 ans qui viennent. » : c’est vrai, le numerus clausus a été supprimé… et c’est inutile. Le numerus clausus a été remplacé par un numerus apertus, parce qu’il n’y a pas eu d’enseignants recrutés, pas de facultés créées… De toute façon, le numerus clausus est un outil, pas un obstacle : si vous voulez former 15 000 médecins au lieu de 8000, bah vous portez le numerus clausus à 15 000… Si vous le supprimez, vous ne faites qu’une seule chose : vous défaussez de toute responsabilité en disant « les régions se démerdent ». Encore du marketing. J’en avais parlé ici et là également
  • « On a perdu ces dernières années environ 6 000 médecins généralistes. On est à un peu moins de 100 000 médecins généralistes aujourd’hui. Le problème, c’est que nous aurons environ 80 000 médecins généralistes en 2025 si tous ceux qui doivent partir à la retraite partent. » : c’est vrai et faux… Vous pouvez jouer avec les chiffres de la DREES vous-mêmes ici : Il y a bien 99 941 médecins généralistes en France MAIS 57 000 libéraux exclusifs ; pour le reste, il y a 19 000 hospitaliers (qui ne font pas de la médecine générale), 16 000 autres salariés et 8 000 mixtes (la plupart ne font pas de la médecine générale ou pas à temps plein). J’avoue que ça m’inquiète un peu que le Président de la République pense qu’il y a 100 000 médecins généralistes au lieu de 57 000 en exercice aujourd’hui…

Voilà pour le diagnostic (de qualité moyenne), passons à la partie « traitement »…

  • « Premier objectif pour moi en ce début d’année, pour nous, c’est d’en quelque sorte, gagner du temps médical. » : comme dit plus haut, c’est un dada pour moi… et on a fait des propositions. On en fait depuis des années. Sauf que ce n’est pas du tout ce genre d’actions simples et « gratuites » qui sont proposées en premier lieu ! La première vision du Président repose sur l’embauche d’assistants médicaux : le concept n’est donc pas en premier de supprimer l’inutile, mais d’embaucher des gens pour aider à faire des tâches inutiles… Ubuesque.
  • « Nous allons à cet égard accélérer le recrutement des assistants médicaux pour les médecins. On a aujourd’hui près de 4 000 assistants médicaux qui ont déjà signé un contrat et ce qui est un des vrais succès (…) on en a près de 4 000, on doit arriver à 10 000 d’ici la fin de l’année prochaine et ça, c’est faisable. Je souhaite qu’on les généralise. On va continuer et donc, on va accroître les financements pour le faire » : au maximum, un assistant médical a permis de faire gagner 4 % de temps de travail par médecin (soit 1 consultation pour 25 par jour). Si on supprime les arrêts de travail court, on fait au moins aussi bien pour les 50 000 médecins du pays… Less is more 😉 Les assistants aident peut-être à améliorer la qualité des soins (ça reste à démontrer en France), mais pour la quantité pas vraiment…
  • « On a commencé à augmenter fortement les places ouvertes pour les infirmiers-infirmières, plus 20 % en 3 ans (…) quand on dit on en forme 100, on en a en réalité 55 qui arrivent sur le terrain, et puis en plus, on a le problème de certains qui se réorientent et vont dire à la fin de leurs études : finalement, je ne vais pas y aller, c’est trop dur ; et d’autres vont faire tout de suite de l’intérim. » : oui, bah faut avoir des postes attractifs en fait…
  • « on doit réorganiser des soins à l’hôpital pour retrouver une échelle humaine (…) en remettant en quelque sorte notre organisation collective à l’échelle humaine [car] un des ressorts du désenchantement c’est une organisation des équipes qui, à force de rationalité, a perdu en prévisibilité, en humanité. Ce n’est la faute de personne. » : gouverner c’est prévoir ; quand on perd en prévisibilité, c’est qu’on a une gouvernance foireuse. Le fautif principal se cache donc derrière ce mot « gouvernement »… surtout quand la phrase suivante est celle-ci, proprement hallucinante : « C’est la faute de plein de bonnes volontés qui voulaient faire des économies, mieux organiser les choses or, à un moment, le système s’est crispé.« 
Une image vaut mille mots. Surtout s’il y a des mots dessus. Image par Pete Linforth de Pixabay
  • « Chaque service doit pouvoir se saisir de cette liberté de s’organiser en autonomie et en responsabilité avec le maximum de liberté dans la construction des plannings sous la conduite des cadres, des chefs de services. » : je ne vois pas bien la différence avec aujourd’hui. Ceci étant, je devine derrière ça la même volonté que « j’ai supprimé le numerus clausus » (sans donner aucun autre moyen, ça ne changera rien par rapport à une augmentation de ce numerus clausus, juste je me défausse, c’est plus ma faute, hop, merci). De manière générale, toute cette partie est franchement confuse, pour conclure par une banalité du genre : « Il faut retrouver cette possibilité d’organiser les choses de la manière la plus adaptée. » Merci Monseigneur, jusqu’alors on essayait d’organiser les choses de la manière la plus désadaptée, quel réenchantement de vous lire / vous écouter.
  • « On doit sortir de la tarification à l’activité dès le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale, pour aller vers un nouveau financement qu’on doit rebâtir sur la base d’un travail en profondeur et d’une concertation qui repose sur une rémunération basée sur des objectifs de santé publique (…) Pour l’hôpital public, les établissements privés, les professionnels de santé dans le libéral, il faut qu’il y ait une part structurante de la rémunération qui repose sur des objectifs de santé publique qu’on négocie à l’échelle d’un territoire. Comment on prend en charge la population qui nous est donnée ? » Alors la rémunération sur objectifs de santé publique, on l’a déjà en ville et globalement c’est mal fichu.
    Adapter la ROSP à la population serait une idée intéressante (parce que les personnes les plus précaires se font moins dépister par exemple, donc il y a une « prime » à exercer dans les milieux les plus aisés aujourd’hui ^^). Mais avoir des « objectifs de santé publique » à l’échelle d’un hôpital (qui n’a pas une liste de patients suivis), je vois difficilement comment ça peut donner quelque chose d’intéressant pour la population. D’ailleurs, le « pay for performance » (P4P) existe depuis de nombreuses années ailleurs et au Royaume-Uni par exemple ça ne réduit pas la mortalité. Enfin, si on veut jouer à parler de « performance », est-ce qu’on doit aussi évaluer le gouvernement sur sa « performance » à améliorer la santé de la population ?
Alors que nos voisins ont réduit leur taux de tabagisme, le taux de tabagisme est stable depuis les années 2000 en France à 33 %… Graphique depuis la page OurWorldInData
  • « Ce n’est pas simplement à l’hôpital qu’il faut mettre les moyens. Il faut reresponsabiliser et inciter à avoir une permanence des soins en ville. Les Français doivent trouver facilement un médecin de garde. Alors, je sais qu’il existe beaucoup d’initiatives. » : aaaargh mais la seule fois où il parle de médecine générale dans son « traitement » c’est pour dire qu’il faut « reresponsabiliser », quel manque de respect total.
  • « Donc il faut mieux rémunérer en quelque sorte celles et ceux qui vont être prêts à former des jeunes et prendre des internes auprès d’eux, à prendre de nouveaux patients, à aider au coup de chauffe quand il existe, à participer à une offre de soins sur le territoire. » : banco, strike – c’est déjà le cas pour tout… c’est vraiment de l’esbrouffe de faire croire qu’on va valoriser ce qui l’est déjà :
    • il y a des sous dans le forfait structure pour l’accueil d’internes… en plus, on est payé pour accueillir des internes, les actes réalisés par l’interne sont pour le maître de stage et il y aussi des aides par la CNAM ou l’ARS (COSCOM ou CRME)…
    • il y a un forfait qui s’appelle « forfait patientèle médecin traitant » : plus on accepte de patients, plus ce forfait (et la ROSP) sont élevés ;
    • les gardes ne sont pas bénévoles (150€ la garde et 50-70€ par patient selon l’heure et le jour de week-end)
  • « Vous voyez que c’est très cohérent avec la généralisation de nos fameux CPTS que nous voulons voir se faire développer. Comme on leur a mis des assistants médicaux, c’est sur les professionnels qui sont prêts à s’organiser sur un territoire avec d’autres et assurer la permanence des soins qu’on va mettre plus de moyens, c’est plus juste. Et donc on va faire avec eux exactement comme on va faire avec l’hôpital, c’est-à-dire on sort d’un financement à l’acte pour être sur un financement à la mission, à la réponse en termes de santé pour une population. » : il y a déjà des financements sur les CPTS ; ce qui est en jeu là, c’est la proportion de notre rémunération… Mais prenons 2 minutes pour discuter de ça avec 3 situations extrêmes :
    • 100 % paiement à l’acte, 0 % « objectif de santé publique » personnel (ROSP), 0 % amélioration de santé sur le territoire (CPTS) : c’est une incitation à faire plein d’actes… et in fine, c’est le meilleur accès aux soins possible ;
    • 0 % paiement à l’acte, 100 % ROSP, 0 % CPTS : c’est une incitation à avoir des patients qui respectent bien les consignes, et donc l’exclusion de « mauvais patients » (les anglais parlent de gaming sur comment améliorer sa ROSP) ; on veut des patients diabétiques oui, mais uniquement des gens qui font du sport, mangent équilibré, prennent bien leur traitement et avec des bons taux d’HbA1c… les autres trouveront un médecin ailleurs, merci.
    • 0 % paiement à l’acte, 0 % ROSP, 100 % CPTS : on passe son temps en réunion à créer des protocoles pour toucher plein d’argent. Voir des patients ? Franchement ma chère, c’est le cadet de mes soucis.
    • Or, que veut la population aujourd’hui ? Plus de protocole ? Plus d’exclusion ? Ou un accès facilité aux soins ?
    • A titre personnel (pour ce que ça vaut), je suis pour la rémunération mixte par actes ET forfaits, mais ils sont souvent mal pensés, sans aucune liberté (les MG d’une CPTS n’ont juste aucun pouvoir, on peut essayer de faire bouger de quelques millimètres les lignes, mais ça n’a rien à voir avec des campagnes d’information nationale de qualité qui nous manquent cruellement)… et le timing est juste catastrophique là avec la démographie médicale en berne pour dire « on va sortir du paiement à l’acte ».
  • « Il faut bâtir un nouveau pacte avec la médecine libérale, un pacte de droits et de devoirs. » : je respecte la fonction présidentielle, je respecte la fonction présidentielle, je respecte la fonction présidentielle, je n’insulte pas le Président, je n’insulte pas le Président, je n’ins…
  • « Pour les médecins spécialistes, il s’agit par exemple de réaliser des consultations avancées dans les zones sous denses ; pour des généralistes, de participer à la prise en charge des soins programmés, d’accueillir des internes en stage, comme je le disais. » : bordel mais en fait, il ne comprend rien ?! Déjà, les généralistes SONT des spécialistes de médecine générale depuis 2004, s’agirait de se tenir au jus (on a un diplôme d’études spécialisées en médecine générale). Ensuite, les soins programmés, c’est le suivi de nos patients… bien sûr qu’on le fait ! Il veut parler là de « soins non programmés » – et là aussi on assume trèèèèèès largement notre part, avec 2 millions de consultations par jour en moyenne, on n’enfile pas des perles.
  • « D’ici à la fin de cette année, que chaque citoyen, puisse avoir accès dans son bassin de vie, à une offre de soins. Alors appelons ça un réseau territorial (…) On a besoin que quand on habite dans un endroit, on puisse avoir quelqu’un en référence. C’est un médecin ou quelqu’un qui travaille avec lui dans ce réseau, qui peut être un paramédical, selon les besoins et de ce qu’on a fléché, qui va être un spécialiste, qui va être à la ville ou à l’hôpital. Et donc on veut créer à l’échelle d’un territoire, en fait, une solution de santé en incitant les acteurs de santé sur un territoire à coopérer entre eux. Donc, vous l’avez compris, dans le financement de l’hôpital, le financement de la ville, c’est là-dessus qu’on va mettre les moyens. » : le risque c’est de ne plus être payé pour voir des patients, mais d’être payé collectivement pour se refiler les patients comme des patates chaudes entre nous… On ne peut pas remplacer un suivi de médecin généraliste par un suivi d’une autre spécialité parce que 1/ ce n’est pas le même métier, 2/ il n’y a pas des professionnels de santé qui sont aujourd’hui en train de se tourner les pouces et qui vont soudain pouvoir assumer un suivi de médecin généraliste.
    Une consultation de médecine générale, c’est un patient de 60 ans diabétique et hypertendu qui a des oedèmes des membres inférieurs depuis son changement de traitement et qui s’est fait mal à l’épaule droite en déménageant, à qui il faut proposer un renouvellement de son vaccin COVID, en 15 minutes s’il vous plait. Ouais, c’est un peu un métier ; c’est pas le plus dur du monde, mais ça ne se remplace pas « d’ici la fin de l’année »…
  • « Je veux aussi qu’on puisse continuer à supprimer toutes les tâches inutiles, comme certains certificats, qu’on puisse développer la télé-expertise, la télésurveillance, qui est une bonne chose. Et à cet égard, je le dis très clairement, le seuil de 20 % de téléconsultation qui a été mis n’est pas une bonne idée. » : aaaaah alors c’est rigolo ça, la « suppression des tâches inutiles comme certains certificats » ici ! Ce n’était pas dans le diagnostic, ça arrive tardivement alors que c’est la base : supprimer l’inutile et voir comment optimiser le temps ensuite…
  • « Nous permettrons aux Français d’avoir recours à d’autres professionnels de santé pour des renouvellements d’ordonnance pour les maladies chroniques, pour la vaccination, pour le dépistage, pour l’éducation thérapeutique qui doivent pouvoir être réalisés par des pharmaciens, par des sages-femmes, par des infirmiers et des infirmières. » : oui, la délégation de tâches. Notons juste qu’on fait plutôt un « suivi », une « réévaluation » qu’un simple « renouvellement » normalement.
  • « Et je le dis, trop de temps médical est gaspillé par un excès d’imprévoyance, de la désinvolture, avec en particulier des rendez-vous non honorés. Pour supprimer cette perte sèche de temps médical, là aussi, un travail sera engagé avec l’assurance maladie pour responsabiliser les patients lorsqu’un rendez-vous ou plusieurs ne sont pas honorés ou lorsqu’il y a des recours abusifs à des soins non programmés. » : moi j’ai une idée : les patients qui sont dans ces situations sont désormais obligés de contacter au préalable l’Assurance Maladie pour prendre un rendez-vous, où il y a quelqu’un qui prendra l’initiative de faire la régulation médicale… Non ? Ah non, on va leur prendre de l’argent ; z’avez qu’à être moins anxieux là, au lieu d’abuser des soins non programmés.
  • « Enfin, je le disais, le médecin traitant doit être la porte d’entrée, mais pas le verrou de notre système. Je veux en effet que dans ce contexte, on puisse à la fois clarifier sur le territoire l’organisation et la simplifier (…) je veux que ces patients chroniques aient accès à ce que j’appellerais une équipe traitante, c’est-à-dire qu’ils puissent avoir sur ces réseaux, ces coalitions d’acteurs qu’on aura identifiées et structurées à l’échelle d’un territoire et d’une équipe (…). Et la logique, c’est que beaucoup de nos médecins généralistes devraient déléguer deux ou 3 renouvellements d’ordonnance par an à l’infirmier de référence, au pharmacien de référence pour n’avoir que des rendez-vous réguliers. » : mais enfin, on fait DÉJÀ des suivis tous les 3 ou 6 mois. Il y a 2 ou 4 renouvellements d’ordonnance par an ET ces consultations ne sont pas un simple suivi la plupart du temps. C’est LE problème d’ailleurs des IPA qui vont faire du suivi de pathologie chronique stabilisée : ça ne marche pas si la pathologie n’est pas stabilisée, et si le patient a une demande aiguë (mal à l’épaule, mal au ventre, etc.), il devra passer par la case médecin. Les IPA n’ont pas vocation à remplacer les médecins généralistes mais surtout à améliorer la qualité d’un suivi chez des patients stabilisés…
  • « Et donc, on aura ainsi des médecins qui accueilleront ces patients ayant recours à ces fameux services d’accès aux soins pour les consultations non programmées. Et là encore, ça va permettre à des libéraux, à des structures privées de s’engager et ça va permettre de décharger l’hôpital de nombreux soins non programmés. C’est comme ça dans beaucoup de territoires qu’on a réussi à tenir l’été dernier. » : lol quelle blague ! Le SAS c’est 6 400 actes en juillet et 16 200 actes en août. C’est 21 000 actes en 2 mois (330 par jour donc…), soit pour 57 000 médecins généralistes en exercice libéral, L’INCROYABLE TAUX DE 0,37 CONSULTATION PAR MÉDECIN GÉNÉRALISTE SUR 2 MOIS ! A titre d’exemple, j’ai fait 1144 actes en juillet-août 2022 (5 % des actes du SAS sur les 2 mois :D)… et sur les dernières années, on a fait 17 millions d’actes en juillet et 13 millions en août : le SAS, c’est donc 0,07 % de ça. Je ne sais pas comment le tourner au mieux, pour qu’on se rende compte que dire « c’est comme ça qu’on a réussi à tenir l’été dernier !« , c’est une aventure au-delà de l’audace, là où seul règne le ridicule…

Voilà… il a également évoqué les 600 000 patients en ALD sans médecin traitant, mais ça mérite un billet dédié. Je vais donc m’arrêter là… je vous épargne la fin traditionnelle sur « je serai à côté de toutes celles et ceux qui soignent », « il y aura, je le sais, l’engagement du ministre et de la ministre déléguée » et « comptez sur mon engagement personnel ». Ca aurait plus de gueule avec « je serai toujours opposé à celles et ceux qui soignent ; sachez que je me désengage totalement de la santé, à l’instar du ministre et de la ministre déléguée« , mais bon, si Monsieur n’aime pas disrupter…

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Recadrages secrets : qui est la taupe ?

C’est devenu une ritournelle exaspérante. Désormais, quand un ministre a fait n’importe quoi, on apprend juste après que le Président l’a « recadré » lors du conseil des ministres. C’est une sorte de marque de fabrique de la présidence actuelle : les blâmes se font en privé, mais sont relayés dans la presse afin de montrer au peuple combien le chef de l’Etat est aussi agacé que lui, mais doit composer avec les bêtises ou l’incompétence de ceux qui l’entourent. Et c’est de plus en plus fréquent au fil des mois…

En plus de multiplier les bourdes et les incompétences, il se trouve que ceux qui entourent le Président de la République ne le respectent absolument pas, puisqu’ils balancent à la presse tout ce qui se dit dans ces conseils privés…

Devant le désintérêt général des services secrets français, j’ai décidé de mener moi-même l’enquête afin de débusquer la taupe ! (Ne me remerciez pas, je suis au service de l’Etat). D’autant que le Président lui-même ne supporte pas ces fuites et insiste pour le respect du « secret défense » notamment en conseil de défense ! On le comprend : si tout ce qui se dit par le chef des armées en privé est dévoilé dans la presse, il devrait rapidement chercher le coupable et l’exclure de ces réunions… c’est un peu problématique d’avoir une « taupe » qui balance tout à la presse, ces réunions pourraient aussi comprendre des sujets plus sensibles.

Ne vous inquiétez pas, monsieur le Président, je vais vous aider avec une grande enquête.
(Extrait de Gala)

J’ai donc tapé « Macron recadre conseil ministres » sur Google, entre 2018 et ce jour (requête ici). Petit florilège (non exhaustif) des 23 pages, en commençant par quelques anciens ministres…

Christophe Castaner, ancien ministre de l’Intérieur

En avril 2019, après une soirée arrosée relayée sur les réseaux sociaux, le ministre de l’Intérieur est recadré par Edouard Philippe en Conseil des Ministres (« être ministre, c’est 24 heures sur 24, y compris en termes de comportement« ). Le Président lui « passe un savon » également, apparemment en privé (ça devrait faciliter la recherche de la « taupe »).

Le mois suivant, il est à nouveau recadré par Emmanuel Macron — comme nous l’apprend Gala — après avoir parlé « d’attaque » au lieu « d’intrusion » par des membres du cortège du 1er mai à l’hôpital Salpêtrière : « évite les micros tendus et tweete un peu moins. » Un conseil qu’on devrait tous suivre d’ailleurs.

Muriel Pénicaud, ancienne ministre du travail

En juillet 2019, Edouard Philippe aurait recadré Muriel Pénicaud en conseil des ministres, pour son « affichage trop public des désaccords » (notamment sur le risque de coupes dans le financement de l’apprentissage)… et on apprend que c’est elle qui se ferait le plus souvent recadrer dans ces conseils.

Le Président n’aurait pas été en reste. Dans Closer, fin 2019, un ministre relate : « j’ai vu Macron défoncer des ministres en Conseil des ministres. C’était chirurgical« . Sur la faible communication autour de la relance des emplois francs, le président aurait estimé que « c’est comme faire une promotion dans un supermarché et l’installer au fond du magasin« .

Edouard Philippe, ancien Premier Ministre

Après avoir évoqué le déconfinement en avril 2020, le Premier Ministre se voit recadré par « un proche du Président » : « Parler quand on ne sait pas, voilà une stratégie étrange, anxiogène. » 

A l’époque du gouvernement Philippe, on note plusieurs recadrages globaux : en juillet 2017, il disait « si on sait donner du sens, on évite les petites polémiques«  ; le mois suivant, il critiquait les notes reçues : « c’est du pipi de chat, ce qui me remonte actuellement de certaines de vos notes : ne vous laissez pas enfermer dans le confort des documents rédigés par vos administrations. Certes, cela peut vous paraître sympathique et confortable de vous placer entre leurs mains. Mais vous verrez, dans six mois, si vous continuez, vous aurez disparu« 

A tel point qu’en février 2020, les ministres et proches (voire ami du président – toujours sympa) se lâchent : « il méprise les gens, il les toise de son intelligence » ; « les ministres disent de lui qu’il se caresse devant les miroirs » ; « c’est moi le roi et ce sont mes députés, mes gens » ; « personne ne se sent aidé, soutenu, porté… (par le Président) »…

Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur

En novembre 2020, Michel, producteur de musique dans le 17ème arrondissement de Paris, est tabassé par des policiers. Le Président aurait appelé son ministre pendant 15 minutes pour « mettre les points sur les i » selon une source proche, et un autre témoin a parlé de « fermeté, d’apaisement et de sanctions ». Ce qui laisse penser que la taupe suit de très près le Président — il appelle en privé à proximité immédiate, allant jusqu’à laisser « la taupe » poireauter pendant un appel de 15 minutes (il y a sans doute un jeu de Mikado dans le bureau du Président pour ces situations).

S’y ajoute une publication publique (facebook, Twitter) que Philippe Moreau Chevrolet estime être un recadrage (public cette fois !) du ministre de l’Intérieur : « je demande au Gouvernement de me faire rapidement des propositions pour réaffirmer le lien de confiance qui doit naturellement exister entre les Français et ceux qui les protègent et pour lutter plus efficacement contre toutes les discriminations. » Un « recadrage des troupes » selon la Nouvelle Tribune.

Après avoir critiqué les résultats de son propre camp, voire même de sa propre liste (ça ne s’invente pas), Gérald Darmanin s’est aussi fait recadrer par Gabriel Attal (qu’il avait critiqué en mars), par Eric Dupont-Moretti en juin 2021.

Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’état auprès du ministre de l’Economie

En mars 2020, les membres du gouvernement échangent en privé sur Telegram. Plusieurs ministres y évoquent la bande passante trop faible, et la secrétaire d’Etat réplique : « En fait, si tu ‘youpornes’à 22h30, ça gêne personne… Juste une question d’organisation… » Ces messages privés se retrouveront… dans le Canard Enchaîné, indignant le Président : « c’est lamentable que, en situation de crise comme celle que nous vivons, on retrouve des échanges comme cela dans la presse« . La taupe est donc dans ce groupe Telegram, qu’on espère limité…

En avril 2021, la secrétaire d’état évoque l’idée de ne pas renouveler les commandes d’AstraZeneca l’année prochaine (ce qui a effectivement été le cas dès juin-juillet). Jean Castex l’aurait alors recadrée par SMS (!) en lui demandant d’être « plus prudente dans ses expressions« . A propos du même vaccin, le Premier Ministre aurait d’ailleurs dit à ses équipes : « il faudrait que Sheila se fasse vacciner« … qui se sont empressées de le répéter au Canard Enchaîné, parce que – eh ! – pourquoi pas se rire un peu des goûts musicaux de son patron dans la presse, ahahah il ne saura jamais que ça vient de nous 4 à qui il l’a dit… ARE YOU CRAZY, TAUPE ?!

Bruno Le Maire, ministre de l’Economie

Lors du conseil des ministres de janvier 2021, le Président aurait dit « je n’aime pas les tireurs couchés« , visant — selon la taupe — Bruno Le Maire, qui est parmi ceux qui critiquent la stratégie vaccinale, la stratégie de confinement ou déconfinement… « Si certains ont des problèmes avec la stratégie sanitaire telle qu’elle est développée, qu’ils viennent m’en parler et j’attends leur lettre de démission ! » aurait-il ajouté.

L’histoire ne dit pas si, après cette réplique cinglante, le Président se tut, fixa le ministre de l’Economie de son regard bleu sur lequel glissaient des éclats métalliques, comme un lac accablé de soleil dont il aurait été impossible, sous le scintillement des reflets, de percer la surface. Probablement pas.

Jean-Michel Blanquer, ministre des sports et des masques-slip

De façon cocasse, ce n’est pas pour sa gestion approximative de la sécurisation des écoles, ses ratés dans le télé-enseignement (accusant des attaques russes) ou sa popularité négative dans le corps enseignant que le ministre en charge de l’Education Nationale s’est fait recadrer… mais pour sa « flagornerie » en mars 2021, lorsqu’il disait au Monde que « le président a acquis une vraie expertise sur les sujets sanitaires, ce n’est pas un sujet inaccessible pour une intelligence comme la sienne et au regard du temps important qu’il y consacre depuis plusieurs mois« . La flagornerie a ses limites.

Il semblerait aussi que Jean-Michel Blanquer se soit fait recadrer en septembre 2021, selon le Canard Enchaîné : « il faut parler tout ce qui va bien, je parlerai donc du sanitaire à la fin » aurait dit le ministre avant que le Président, « exaspéré« , le reprenne sur le dédoublement des classes, qui sont en sureffectif.

Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche (il parait)

Après avoir réclamé une enquête du CNRS sur l’islamogauchisme qui gangrène l’université, Frédérique Vidal (soutenue par Jean-Michel Blanquer et Gérard Darmanin) aurait été « mollement recadrée » (selon le Monde) en février 2021 par le Président qui aurait rappelé « son attachement absolu à l’indépendance des enseignants-chercheurs« . Selon un ministre présent, le Président aurait dit « la semaine qui vient de s’écouler a prouvé que, malgré le Covid, on pouvait faire exister d’autres sujets dans l’actualité. Mais on gagnerait à reproduire la démonstration de manière concertée et organisée«  sur le mode « il faut arrêter de déconner : une fois, mais pas deux »… Pour un autre « conseiller de l’exécutif », « Vidal est plus près de la porte que de l’augmentation »…

Barbara Pompili, ministre de l’écologie

Après la défaite LREM aux régionales en juin 2021, le Président a recadré Barbara Pompili, cofondatrice du mouvement En commun, qui s’est félicité d’une décision du Conseil d’Etat de suspendre la réforme de l’assurance chômage lancée par son gouvernement… « Inacceptable et déloyal« , tout comme l’appel du même parti à soutenir Marie-Guite Dufay, candidate PS en Bourgogne-France-Comté (et réélue), où LREM maintenait sa liste.

Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, chargée de la citoyenneté

En décembre 2018, après qu’elle ait évoqué le rétablissement de l’ISF, elle aurait été « recadrée » par le Président en Conseil des Ministres : « nous ne détricoterons rien de ce qui a été fait depuis dix-huit mois« . En février 2021, un proche du chef de l’Etat fait savoir que Marlène Schiappa « énerve souverainement le Président ».

En mars 2020, le Président l’aurait brutalement coupée dans une longue présentation de son bilan en lui disant de « revenir la semaine prochaine pour une présentation qui correspond à [s]es attentes« .

En avril 2021, le Président recadre Marlène Schiappa en conseil des ministres selon BFMTV. Après avoir annoncé la mise en place d’états généraux de la laïcité chez Hanouna (sic), elle se serait vu rétorquer par le Président : « les Français s’en fichent, et moi aussi : on n’a pas besoin de colloque, de forum, ou de je ne sais quoi. Si c’est pour regarder le film de Caroline Fourest sur Tariq Ramadan, on l’a déjà vu, on a bien compris ! » Puuuuunchline ?
Oui, mais non ! Comme l’a synthétisé Challenges, on apprend rapidement dans Marianne que l’Elysée dément BFM : « il ne s’en serait pris ni à Marlène Schiappa ni à Caroline Fourest. Il s’agirait en réalité de conflits idéologiques au sein même de la macronie au sujet de la laïcité ». Puis le Parisien relate une 3ème version où le Président aurait finalement dit « Ce n’est pas la peine de faire d’énièmes états généraux pour répéter ce qu’Aristide Briand a dit, alors que ça fait 250 fois que je vous dis les choses.« 

Ah oui. Donc la taupe a confondu Caroline Fourest et Aristide Briand. On dit « aveugle comme une taupe », mais visiblement la taupe du conseil des ministres semble souffrir davantage de problèmes auditifs.

Jean-Baptiste Djebbari, troll Twitter et ministre des transports

Sur BFM, le ministre des transports annonce que le gouvernement compte vacciner 26 millions de Français d’ici l’été ; sauf que l’objectif initial est de 15 millions (en pratique au 21 juin, il y avait 17 millions de schémas complets et 32 millions de primovaccinés). Lors du conseil des ministres de janvier 2021, le président aurait « exigé que ses collaborateurs se contentent d’évoquer leur secteur« .

Il s’était également fait recadrer en avril 2021 par Barbara Pompili après avoir proposé la légion d’Honneur aux 2 présidents de l’aéroclub de Poitiers, après que la maire écologiste Léonore Moncond’huy ait assumé de ne plus financer des sports basés sur la consommation de ressources épuisables.

Olivier Véran, ministre de la Santé

En septembre 2020, le ministre aurait proposé des mesures plus restrictives, ce que le Président n’aurait pas apprécié : « un million de tests par semaine, c’est bien beau, mais si les résultats arrivent trop tard, ça ne sert à rien« . D’ailleurs, sans nous concerter, Gala se demandait à l’époque qui était la taupe également

En janvier 2021, le Président aurait carrément parlé de « fiasco » : « Moi, je fais la guerre le matin, le midi, le soir et la nuit. Et j’attends de tous le même engagement. Or là, ça ne va pas. La technocratie est tatillonne. Ça doit changer vite et fort et ça va changer vite et fort. Nous sommes sur un rythme de promenade en famille, et ce n’est à la hauteur ni du moment, ni des Français« , aurait-il lancé au téléphone à divers interlocuteurs, selon la gazette de l’Elysée / le JDD. Ah ! Par téléphone ! La taupe est plusieurs pour relayer ces propos HAUTEMENT… flatteurs pour le Président en fait ! Ca tombe drôlement bien.

En février 2021, le Président aurait « engueulé » Olivier Véran parce qu’il ne l’a pas averti de l’existence des anticorps monoclonaux… La taupe devait forcément être présente lors de cette « engueulade »…

En mars 2021, le Président critiquait encore le fait que « le boulot n’a pas été fait« . Visiblement, le Président ne souhaitait pas prendre son « pari » de janvier 2021 sans embarquer son ministre — opposé à ce pari — avec lui…

… Emmanuel Macron, Président de la République

Pour couronner le tout, il semblerait que le Président se fasse également recadrer par un narrateur de chez Audible, ancien Président lui-même !

Méta-recadrage

Il n’est évidemment pas le seul, puisque des « amis » du Président s’y mettent aussi. Par exemple, on apprend mi-février 2021 dans un papier déjà biiiiien daté qu’il « pique des colères d’enfant » selon un proche ami (… bien choisir ses amis quand même), et qu’il fustige les scientifiques qui « ne répondent à ses interrogations que par un seul scénario : celui du reconfinement », ou les élus qui réclamaient en mars 2021 des mesures plus efficaces.
L’histoire lui aura donné tort avec quelque 10 000 décès supplémentaires dus à ces « colères d’enfant« .

« Il a eu raison » : bah non. Les limites de la flagornerie.

Conclusion

Ces recadrages publics ne mènent jamais à rien. En décembre 2020, le Midi Libre s’intéressait aux difficultés du Président à se séparer de ses proches : Richard Ferrand, Gérard Collomb, Alexandre Benalla, Alexis Kohler, Gérald Darmanin…

Le 24 juillet 2018, pour défendre Benalla, il disait d’ailleurs « on ne sacrifie pas des têtes de fonctionnaires, de ministres ou de collaborateurs sur l’autel des émotions populaires. Le responsable, c’est moi, qu’ils viennent me chercher. »

Il est difficile d’identifier formellement la taupe. Emmanuel Macron critiquait d’ailleurs ouvertement ces sorties en juin 2020 : « je continue à lire dans les gazettes ce que je pense. J’en ai marre de ces pseudos conseillers ministériels qui passent leur temps à dire ce que je n’ai pas dit« . Il l’a bien répété en mai 2021 : « Si certains d’entre vous ont des vocations d’éditorialistes, il en faut plein dans les chaînes d’info. Vous êtes ministres, pas éditorialistes ». Un recadrage « fréquent », raconte « fataliste et blasé », un « ministre de premier plan » le jour même au Parisien, « confirmé par plusieurs des présents »… ce qui est quand même le comble de l’ironie.

L’ironie en 2 paragraphes.

Il semblerait que ce soit quelqu’un systématiquement présent avec Emmanuel Macron, y compris dans ses appels privés…

Oh. A moins que tout ça ne soit que de la communication politique ? Des coups d’essais dans la presse de ce qu’il veut dire mais pas dire ? Une façon d’être « responsable mais pas coupable », histoire qu’on ne vienne pas trop le chercher quand même ? Je ne sais pas ce que je préfère entre un Président qui ne sait pas faire respecter le secret défense qu’il réclame régulièrement et un Président qui manipule l’opinion…

Mais dans ce dernier cas, relayer de la compol organisée, visant à manipuler l’opinion publique quant à l’image du Président, n’est-ce pas un peu problématique ?

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Pourquoi la CNAM, la CNIL et le ministre se moquent-ils des médecins avec la liste des non-vaccinés ?

Bon, je m’avance beaucoup. En réalité, la CNAM, la CNIL et le ministre ne sont probablement pas de mauvais bougres, souhaitant « se moquer » délibérément de médecins généralistes. Au fond d’eux, ils pensent probablement faire leur maximum pour nous aider.

Ils se trompent.

Sur cette histoire de liste, nous n’avons eu droit qu’à une succession d’incompétences, probablement liées au fait que personne n’a dû prendre l’avis d’un seul médecin généraliste en exercice dans cette histoire. Je doute que le Ministre, que la CNIL ou que la CNAM ait pris le temps (siiiii pénible) de discuter avec un généraliste en exercice. Ou alors ils ont choisi un type accroc à la colle.

Allons-y. Comme d’habitude, je vais illustrer avec des tweets – souvent les miens, parce que c’est plus simple de les retrouver… Je vais tenter de faire bref, et je doute y parvenir. Désolé.

Combien de temps a-t-il fallu pour obtenir cette liste ?

3 mois !

Depuis mi-avril 2021, plusieurs médecins et syndicats réclament d’avoir leur liste des patients qui sont (1) vaccinés, (2) avec quel vaccin / combien / quelle date, (3) immunisés/contaminés.

J’ai lancé un défi au Hackathon sur ce sujet en avril, ce qui m’a permis d’obtenir un contact auprès de l’Assurance Maladie… qui m’a assuré à l’époque que c’était un sujet d’intérêt, défendu par Thomas Fatome lui-même (cf. extrait du mail ci-dessous dans le tweet).

Le 29 juin (2 mois plus tard !), Olivier Veran aurait demandé leur avis à la CNIL. Soit il s’agit d’un jem’enfoutisme royal (2 mois pour demander cette liste ?!), soit il s’agit d’un peu de comm’ facile…

Une dizaine de jours plus tard, le 7 juillet, la CNIL a rendu un avis sur la liste… En gros, ça disait :

  • la CNIL n’est pas favorable à la constitution de listes de patients non-vaccinés pour les médecins,
  • mais le contexte sanitaire peut justifier cette pratique
  • par contre les médecins ne doivent pas utiliser cette liste pour CONVAINCRE leurs patients, mais juste les informer.

Plus débile que ça, ils étaient obligés de publier leur avis sur le blog d’Azalbert.

https://twitter.com/CNIL/status/1412650493709586433?s=20

Le 7 juillet à 15h20 (puis le 20 juillet en rappel), Thomas Fatome lui-même (directeur général de la CNAM) signait un mail disant ceci :

« Pour vous aider, l’Assurance Maladie met à votre disposition, sur demande, la liste de votre patientèle « médecin traitant » non vaccinée contre le Covid. 
A la fin du mois de juillet, cette demande pourra être faite directement dans amelipro. 
Dans l’attente de cette solution pérenne, un circuit particulier est mis en place pour vous permettre d’obtenir ces informations à travers un envoi unique :
     – Vous pourrez adresser un mail à l’adresse … 
     – Vous recevrez en retour, dans un délai court, un mail indiquant que votre liste est disponible sur amelipro dans l’espace d’échange médical sécurisé.

Signé : Fatome-masque (rhooo ça va)

Le vendredi 16 juillet, dans l’espace sécurisé, voici le mail reçu.

Cher confrère,

Vous avez demandé votre liste « patientèle médecin traitant » non vaccinée contre la COVID-19.

Cette liste, au format «.csv », s’ouvre avec un tableur de type Excel. Elle contient le nom, le prénom, le NIR et la date de naissance (format AAAA/MM/JJ) de chaque patient non vacciné vous ayant déclaré comme médecin traitant. La date de la mise à jour est indiquée dans le nom du fichier.

NB : Si jamais, à l’ouverture du fichier, les NIR s’affichent sous la forme 1,80xxx E12, il suffit de sélectionner la colonne contenant les NIR, choisir « Format de cellule » avec un clic droit, puis sélectionner « Nombre » et cocher « 0 décimales ». Vous aurez alors un affichage des NIR sous la forme 180xxxxxxxxxxx

Non mais… l’accessibilité, ça vous parle ?

Depuis quelques jours, on peut effectivement faire la demande directement dans « Patientèle médecin traitant » sur l’onglet « Vaccination ».

48 heures ? Les gars, je vous demande pas de le recopier sur un papyrus hein.

Je risque de l’apprendre ici à quelques confrères et consoeurs, parce que la communication dessus est assez désastreuse – rien que sur Twitter, un certain nombre de médecins n’ont pas compris qu’ils avaient accès à cette liste dans l’espace sécurisé où nous n’allons pas si souvent…

https://twitter.com/olivierveran/status/1422626913886121984?s=20
Marrant, je serais celui qui a mis 2 mois pour rendre accessible la liste, je ne serais pas trop prompt à troller sur Twitter à son propos en fait.

Ca permet d’obtenir la liste sous… 48 heures, au format CSV. Ca ressemble à ça :

NOM;PRENOM;NIR;DATE_NAISSANCE
CHRIST;JESUS;101129900000100;00011225
...
VOLDEMORT;BERNARD;126129900300132;19261231

Voilà… Un CSV absolument dégueulasse, avec 4 colonnes séparées par des point-virgules, avec nom, prénom, date de naissance dans un format improbable et numéro de CPAM (qui ne sert à rien)… Je sais remettre ça en forme, merci. Dedans, il y a des patients non éligibles, des patients déjà vaccinés, des patients décédés… (et je ne suis pas seul à avoir noté ça).

Mais le problème c’est surtout… QU’ILS N’ONT PAS COMPRIS LA MOITIÉ DES OBJECTIFS !

Ce qui m’amène à la partie 2.

Que voulions-nous ? A quoi devait servir cette liste ?

L’intérêt de cette liste est multiple :

  • avoir un état des lieux dans notre patientèle (x % des plus de 75 ans vaccinés, etc.)
  • pouvoir prioriser les doses (ce qui est évidemment moins utile en juillet que ça l’était en avril/mai…)
  • pouvoir « aller vers » les patients qui n’ont pas pris de RDV (parce qu’ils sont seuls, isolés, qu’ils n’ont pas osé, qu’ils attendent qu’on les contacte, qui hésitent et n’osent pas appeler pour avoir l’avis de leur médecin, qui veulent être vaccinés à domicile ou au cabinet…)
  • pouvoir appeler des patients lorsqu’on prévoit d’ouvrir un flacon de 12 doses de Moderna (ou à l’époque de 12 doses d’AstraZeneca ou 6 de Janssen) – donc une liste accessible en 48 heures, c’est pas vraiment ça
  • pouvoir appeler en urgence des patients lorsqu’il y a un ou des désistements sur une session de vaccination, dans le flot des consultations qui se poursuit à côté…
  • se rendre compte d’erreurs : patient qui a fait une première dose mais a raté la 2ème (nous suivons des patients avec des troubles cognitifs par exemple…)

Ca a(vait) cet intérêt « égalitaire » : aller vers ceux qui n’ont pas l’app Doctolib sur leur smartphone, voire qui n’ont pas de smartphone. Quand il fallait batailler pour se vacciner en avril, il y avait 2 grands choix :

  • donner cette liste aux généralistes afin de prioriser sur les facteurs de risque et d’aider à la prise de rendez-vous pour les plus précaires ;
  • ouvrir des créneaux non pris à ceux qui savaient le mieux utiliser internet et diverses applis.

C’est le 2ème point qui a été choisi – le 1er appel à plus d’égalité, il aura fallu attendre 3 mois pour qu’il soit entendu.

Le problème du CSV transmis c’est que nous ne savons pas :

  • si les patients sont en cours de vaccination (0 dose ? 1 dose ?)
  • si les patients ont été positifs au COVID et à quelle date (quand leur proposer le vaccin dans ce cas)
  • si des patients ont raté leur date de 2ème dose

Quels sont les risques de cette liste ?

Aucun. Il n’y a AUCUN foutu risque à ces listes de non-vaccinés, c’est un fantasme de la CNIL. (Evidemment, attendez 2 secondes avant de bondir avec « les listes, les pires heures de l’histoire de France, un scandale »…)

Explorons un peu.

Admettons qu’une personne mal intentionnée cambriole un médecin et récupère ce SUPERBE CSV qui donne une liste de quelques centaines de personnes non vaccinées dans sa ville. Bon. Voilà, il va en savoir à peu près autant que n’importe quel vigile de discothèque ou bientôt de restaurant.

Admettons qu’un super réseau de cambrioleurs parvienne à récupérer ces MAGNIFIQUES CSV auprès des 50 000 médecins généralistes français. Bon, voilà, après une organisation de 4 mois, 50 000 doubles de clés récupérés, ce réseau de malfaiteurs aura mené à bien ce larcin, leur permettant de découvrir que Jacqueline Raclette, 63 ans, n’est pas vaccinée. Dites donc. Ca valait le coût d’y investir le PIB du Tuvalu.

Mais ce qui est LE PLUS DRÔLE…

… c’est que cette liste n’apprend RIEN aux médecins généralistes.

Les médecins généralistes ont accès au statut vaccinal de tous les patients dont ils ont le numéro de sécurité sociale depuis le début ! C’est la CNIL qui leur a donné cet accès.

On clique sur « Vaccination COVID »
On rentre son numéro de sécurité sociale
Et hop, on a le statut vaccinal (dont on peut avoir le détail en cliquant dessus)

Oui mais un patient à la fois c’est long, donc personne ne le fera…

Bah non justement. Cette liste qu’on demande pour faire notre travail, c’est juste une simplification d’accès. On a déjà cet accès, rendez-nous plus facile et plus performant notre travail de vaccination.

Les médecins ne sont pas des truands qui veulent vendre la liste de leurs patients non vaccinés… déjà, parce que tout le monde s’en fiche, et ensuite parce qu’on a 2-3 autres choses à faire.

La CNIL protège les gens, pour éviter qu’on fasse des choses mauvaises sur les internets, on ne peut pas leur en vouloir d’être excessif dans cette mission…

C’est là qu’il y a un petit malentendu.

Quand les médecins généralistes demandent LEUR liste de LEURS patients, il n’y a aucun risque, mais des précautions énormes. Des bâtons dans les roues de la vaccination. Et la CNIL est applaudie – c’est peut-être ce qu’ils viennent chercher avec leur avis plus tiède qu’une bouteille d’eau restée sur la plage arrière de la voiture après une journée de plage.

Déjà, il y a des listes plus sensibles qui existent déjà, avec leur accord, donc c’est vraiment une posture. Les postures c’est bien, la compétence c’est mieux.

Création d’un PDF, d’un XLS (tiens pas un CSV) de la liste complète de ma patientèle avec une « affection longue durée ».

Ensuite – et surtout – depuis janvier 2021, la CNIL a autorisé :

  • tous les médecins, pharmaciens, infirmiers à avoir accès au statut vaccinal d’un patient dont ils disposent du numéro de sécurité sociale (comme illustré plus haut avec mon propre numéro) ;
  • tous les établissements de santé, auxiliaire médicaux, chirurgiens-dentistes, médecins, pharmaciens, sages-femmes et acteurs du médico-social à avoir accès au numéro de sécurité sociale de tout patient…

C’est le téléservice INSi (Identité Nationale de Santé, intégré sur nos logiciels métiers depuis le 1er janvier). Concrètement, il suffit de rentrer nom, prénom, date de naissance et sexe pour obtenir le numéro de sécurité sociale.

Vous voyez où je veux en venir ?

C’est protégé par la CNIL, donc c’est bon.

Ahahah… tu déconnes ?!

Et non.

La CNIL interdit les généralistes de connaître le statut vaccinal de leurs patients de façon simple, mais autorise tous les professionnels de santé du pays à connaître le statut vaccinal de toute personne dont la date de naissance est connue…

Et on s’en fiche en vrai. On n’en fera rien.

Mais il faut présenter honnêtement le travail de la CNIL. Quand le Ministre, la CNIL et la CNAM ne nous aident qu’avec moult bâtons dans les roues, quand la CNIL va jusqu’à expliquer qu’il faut « ne pas utiliser la liste pour convaincre », quand la CNAM nous livre un CSV tout dégueulasse pour « oulalala faut pas trop en donner ou trop lisible », je me dis qu’ils ne comprennent pas bien ce qu’ils autorisent et ce qu’ils n’autorisent pas.

Soyons honnête, la liste des patients non-vaccinés du Docteur Grostéto à Tricotis-les-Aigletons, ce n’est pas de nature à intéresser la population.
Par contre, savoir quel politicien, candidat, quel animateur TV, quel acteur, quelle personnalité publique s’est fait vacciner à quel date, avec quel vaccin… ça peut sans doute trouver un autre intérêt de leak sur Reddit et compagnie.

Donc si la CNIL s’en fiche de ça, si elle pense que les données peuvent être accessibles à tout professionnel de santé, et qu’il y a un faible intérêt dans le pays pour connaître le statut vaccinal d’autrui (parce qu’il faut bien reconnaître qu’on s’en tape), il serait temps de nous FOURNIR UNE LISTE CORRECTE, DANS UN FORMAT CONVENABLE, AVEC DES INFORMATIONS UTILES ET COMPLÈTES concernant le statut vaccinal de nos patients.

NB. Pour information, je me suis rendu compte de ces possibilités de l’INSi le 16 juillet (je ne suis pas vif).
J’ai proposé à la CNIL d’en discuter ; j’ai contacté (pour la 1ère fois de ma vie évidemment…) l’accueil de l’Elysée pour les informer également que n’importe quel professionnel de santé en France pouvait récupérer le QRCode d’absolument n’importe qui. Ca n’a finalement pas eu l’air de les émouvoir, ce qui est quand même pas mal en faveur de la « posture » 😉

Désolé, on est trop occupé à empêcher les généralistes de connaître le statut vaccinal de leurs patients en France, veuillez nous recontacter plus tard.
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[Fiche] Certificat d’isolement – version octobre 2020 (le retour)

Je la fais courte : le 5 mai, préparant le déconfinement, le gouvernement avait prévu du chômage partiel pour les personnes les plus vulnérables. Il y avait une liste de 11 pathologies, dont l’obésité, le diabète, les pathologies respiratoires sévères, etc.

La vulnérabilité mentionnée au I de l'article 20 de la loi du 25 avril 2020 susvisée répond à l'un des critères suivants :
1° Etre âgé de 65 ans et plus ;
2° Avoir des antécédents (ATCD) cardiovasculaires : hypertension artérielle compliquée (avec complications cardiaques, rénales et vasculo-cérébrales), ATCD d'accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV ;
3° Avoir un diabète non équilibré ou présentant des complications ;
4° Présenter une pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d'une infection virale : (broncho pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d'apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ;
5° Présenter une insuffisance rénale chronique dialysée ;
6° Etre atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
7° Présenter une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2) ;
8° Etre atteint d'une immunodépression congénitale ou acquise :


- médicamenteuse : chimiothérapie anti cancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive ;
- infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3 ;
- consécutive à une greffe d'organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques ;
- liée à une hémopathie maligne en cours de traitement ;


9° Etre atteint de cirrhose au stade B du score de Child Pugh au moins ;
10° Présenter un syndrome drépanocytaire majeur ou ayant un antécédent de splénectomie ;
11° Etre au troisième trimestre de la grossesse.
Critères de vulnérabilité au 5 mai, selon la science

Le 29 août, alors que la plupart des scientifiques sérieux (parfois dits « alarmistes ») disaient que la deuxième vague était face à nous, le gouvernement a choisi de remettre tout le monde au travail, à l’exception des plus vulnérables parmi les plus vulnérables (par exemple les diabétiques de plus de 65 ans pouvaient bosser, sauf en cas d’obésité ou d’infarctus/AVC/AOMI/rétinopathie/neuropathie/néphropathie ; les personnes dialysées pouvaient aussi se dispenser d’aller au travail).

Sont regardés comme vulnérables au sens du I de l'article 20 de la loi du 25 avril 2020 susvisée les patients répondant à l'un des critères suivants et pour lesquels un médecin estime qu'ils présentent un risque de développer une forme grave d'infection au virus SARS-CoV-2 les plaçant dans l'impossibilité de continuer à travailler :
1° Etre atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
2° Etre atteint d'une immunodépression congénitale ou acquise :


- médicamenteuse : chimiothérapie anticancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive ;
- infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3 ;
- consécutive à une greffe d'organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques ;
- liée à une hémopathie maligne en cours de traitement ;


3° Etre âgé de 65 ans ou plus et avoir un diabète associé à une obésité ou des complications micro ou macrovasculaires ;
4° Etre dialysé ou présenter une insuffisance rénale chronique sévère.
Critères de vulnérabilité au 29 août, selon le… la… enfin selon.

Le 15 octobre, le Conseil d’Etat a suspendu ce deuxième décret, pour lequel les critères ont été jugés « ni cohérents, ni justifiés ».

C’est tellement pathétique de se faire recaler par le Conseil d’Etat pour une forme de négligence quant à la santé publique des citoyens que je ne vais pas commenter plus que ça. Si vous voulez en savoir plus, dans son journal d’épidémie du 19 octobre publié dans Libération, Christian Lehmann est revenu très clairement (et sans concession) sur ces décisions, sur l’égarement de France Assos Santé et du gouvernement.

Voici donc le certificat que je remets à nouveau à mes patients ; je précise l’avis du conseil d’Etat afin d’éviter que les employeurs ne s’y retrouvent pas (hélas à ce jour, le gouvernement a peu fait de publicité de cette décision du Conseil d’Etat). N’hésitez pas à l’utiliser de votre côté.

Je, soussigné Docteur METTEZUNMASQUEDANSTOUSLESLIEUXCLOSOUDENSES, certifie que

doit, compte tenu des recommandations sanitaires, respecter une consigne d’isolement le conduisant à ne pas pouvoir se rendre sur son lieu de travail. 

Il peut télétravailler ou à défaut bénéficier du chômage partiel (ou, dans la fonction publique, être placé en autorisation spéciale d’absence / ASA).

Ce certificat est établi selon le décret n° 2020-521 du 5 mai 2020 définissant les critères permettant d’identifier les salariés vulnérables présentant un risque de développer une forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2 et pouvant être placés en activité partielle au titre de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

Pour mémoire, le juge des référés du Conseil d’Etat a prononcé le 15 octobre 2020 la suspension des articles du décret n° 2020-1098 du 29 août 2020 pris pour l’application de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020, jugeant « que le choix des pathologies qui ont été conservées comme éligibles (…) n’est pas cohérent ni suffisamment justifié par le Gouvernement » (décision consultable ici : https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/suspension-des-nouveaux-criteres-de-vulnerabilite-au-covid-19-ouvrant-droit-au-chomage-partiel).

Certificat établi à la demande de l’intéressé et remis en mains propres. 

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e-CMGF 2020 (2 et 3 juillet) : le premier e-congrès de médecine générale de France

Les 2 et 3 juillet, alors que ma grand-mère fêtait ses 94 ans et que le Président nommait un nouveau Premier Ministre, s’est déroulé le premier e-congrès de médecine générale de France. J’ai posé mes 2 journées pour le suivre depuis mon cabinet (ou son jardin), c’était un chouette moment.

Ca fait un moment que je devais faire un retour, mais le temps m’a un peu manqué… mieux vaut tard que jamais, d’autant que le congrès est encore en ligne jusqu’en décembre, vous pouvez toujours vous inscrire et tout retrouver là-bas, à des prix très concurrentiels… Je vais donc essayer de vous donner envie 😉

Les tarifs sont particulièrement faibles pour les externes, internes et jeunes médecins : 35€ !

Le fond du congrès : ce que j’en ai retenu

Comme toujours, la cérémonie d’ouverture a été un grand moment. Ce n’est évidemment pas l’intervention « boisée » du ministre qui avait un intérêt mais celles d’Isabelle Cibois-Honnorat, de Paul Frappé et de sa fille !

Comme l’an dernier, j’ai « live-twitté » ce que je suivais (ces tweets peuvent être « déroulés ») :

Un petit résumé condensé ici ce que je retiens pour ma pratique, en quelques lignes :

  • il existe un questionnaire pour les allergies médicamenteuses, que personne n’utilise (ENDA, disponible iciarticle là)
  • Il existe un site web pratique pour déterminer si une étude passe ou non par un comité d’éthique selon la loi Jardé
  • Signes cliniques du COVID-19 : courbatures, anosmie et agueusie ; le reste est aspécifique ; les signes digestifs sont plutôt négatifs
  • le trouble déficit de l’attention et hyperactivité (TDAH) – 2 sessions intéressantes :
    • triade inattention (oublis, sensibilité aux distracteurs, ne termine rien…), hyperactivité motrice (une idée, une action… donc prise de risque), impulsivité (vit dans le présent, interrompt…)
    • depuis toujours et partout
    • 5 % des enfants,
    • n’est pas dû à « trop de laxisme » ou à « trop d’écrans » (à l’inverse, ça peut être associé à plus de punition et plus de consommation d’écrans),
    • ce n’est pas une mode sociétale (moins diagnostiqué avant, quand l’hyperactivité – notamment des filles – pouvait être plus brimée, et quand les enfants faisaient parfois 10 km à pied pour aller à l’école avant de jouer en extérieur…) ;
    • à la maison, les parents peuvent utiliser l’autoquestionnaire de Conners,
    • il existe des outils pour le dépistage à l’école ;
    • ils ont des avantages à utiliser (curiosité, attention, énergie, inventivité…) ;
    • il faut être dans le renforcement positif plutôt que la punition ;
    • il faut apprendre à fractionner les tâches pour avancer.
  • Alcool :
    • 41 000 décès/an en France et 120 milliards de dépenses de santé par an
    • Consommation normale d’alcool : pas plus de 10 verres par semaine + pas plus de 2 verres par jours + des jours sans consommer (résumé parfois en « maximum 2 verres par jour, pas tous les jours »).
    • Toutes les prises en charge ont un niveau de preuve « moyen »
    • selon le Dr Jean-Michel Delile, « on aurait la mutation pour digérer l’alcool depuis 10 millions d’années (avantage sélectif) » et « nous avons probablement stocké de la bière avant le pain ».
    • il faut des objectifs cohérents avec les attentes des patients : pour 50-80 % d’entre eux, il s’agit d’une réduction (l’abstinence est plutôt réservée aux patients en rechute) : « evidence does not make decisions, people do. »

Mes interventions

Comme souvent, j’avais plusieurs présentations. Vous pouvez retrouver les PPT sans la présentation vidéo sur ResearchGate, derrière les liens suivants :

Evidemment, je n’ai pas livetwitté mes interventions, donc vous ne les retrouverez pas plus haut. Les plus intéressantes à mon sens étaient le retour sur Stop-Postillons et sur l’actualité en pharmacovigilance.

Une de mes présentations a été reprise par Le Généraliste dans un article.

La forme du congrès

Au-delà du fond, ce premier e-congrès a été une expérience nouvelle et intéressante. Comme toujours, je me suis posé la question : pourquoi y participer ?

  • Présenter mes travaux (c’est toujours plaisant de partager – c’est un peu le but de faire des travaux de recherche de pouvoir les diffuser, pour que d’autres s’appuient dessus) ; c’est d’autant plus plaisant quand ça ne présente plus aucun intérêt dans mon CV, j’ai un agréable sentiment de grande liberté sur le fond et la forme !
  • Faire une pause dans mon quotidien au cabinet en s’amusant… le CMGF est particulièrement « détente » ; cette année, le thème était « la BD », dans le design, le choix du nom des ateliers, etc.
  • Mettre à jour mes connaissances et donner de nouvelles idées de recherche, en assistant à des sessions intéressantes.

Il y a eu pour moi plusieurs intérêts à ce congrès en ligne :

  • gagner le temps de transport, de logement, pouvoir poursuivre des activités locales (comme aller à un cours de piano avec un masque !) ;
  • avancer de la paperasse au cabinet entre deux : scanner, répondre à des courriers, renvoyer une ancienne box à la Poste après le passage à la fibre, etc. (2 jours de pause clinique mais sans se surcharger au retour, c’est appréciable !) ;
  • naviguer entre les sessions pour ne piocher que ce qui nous intéresse (ce n’est pas possible en pratique, on ne quitte pas les salles entre deux…)
  • continuer de (re)voir des sessions intéressantes par la suite, jusque fin décembre.
  • parler entre personnes assistant au congrès (notamment en plénière) : le chat a bien fonctionné pour ça.

J’ai bien aimé le format court aussi : je préfère personnellement 2 jours que 3 (j’ai du mal à maintenir longtemps mon attention…). Le format en ligne permet justement de suivre l’équivalent de 3 jours finalement !

Les à-côté du congrès ont été particulièrement réussis et intelligents aussi : c’était agréable entre 2 sessions d’aller assister à l’escape game (dans les bureaux du CMGF !), à la chasse au trésor, ou de récupérer un « livre de jeux de vacances » pour le médecin généraliste !

Dans les points amusants (mais non officiel pour cette année), il y avait le bingo de @DrePetronille… que nous avons largement alimenté lors de la dernière présentation sur les « actualités » où j’avais l’honneur d’être invité !

Evidemment, il y a quelques regrets pour ce e-CMGF :

  • Même si nous pouvions bien communiquer via les chats, ce n’est pas exactement pareil qu’un congrès « IRL » où nous pouvons nous croiser au détour d’une allée, d’une session, d’un restaurant indien…
  • Pas de cérémonie de clôture, ni de remise de prix (qui permettent de (re)découvrir ce que d’autres ont aimé et qu’on a pu rater) : après la dernière session où j’avais l’honneur d’être invité (et où nous nous sommes bien amusé en s’instruisant), j’avais donc une impression de rester sur ma faim (la clôture était notée jusque l’avant-dernier programme).

Mais ça, c’était avant le 7 septembre ! Désormais, la cérémonie de clôture est en ligne et a permis la remise de plusieurs prix pour des présentations de grande qualité (posters à retrouver ici) :

  • Prix de poster du comité scientifique : Repenser le principe de l’autonomie pour favoriser la relation de soin, par Florian Martinet-Kosinski, étudiant en médecine (externe) à Toulouse
  • Prix de poster du public : La vasectomie : revue narrative de la littérature et élaboration d’une fiche d’information à l’intention du médecin généraliste, par Julie Vergonjanne, également à Toulouse.
  • Prix de la communication orale du comité scientifique : Coviclinique, signes cliniques associés à la RT-PCR chez les patients, par Hubert Maisonneuve de Genève (et Benoît Tudrej, Paul Sebo, Julie Lourdaux, Clara Cuzin, Martin Floquet, Dagmar Haller). Une excellente présentation que je recommande aussi particulièrement !

En conclusion de ce congrès, je me suis dit qu’il y aurait la place pour un congrès CMGF à Paris sur 2 jours en mars 2021 (si possible !) et un jour de e-congrès en juillet, ou quelque chose dans ce goût. Le e-congrès est un bon complément au congrès et maintenant que tout est en place, il peut être reproduit plus facilement que la galère qu’on imagine pour cette première édition en urgence ! Un énorme bravo à toute l’équipe d’organisation…

… et j’en profite pour glisser le fait que je viens d’intégrer le comité scientifique du CMGF 2021, qui aura lieu du 25 au 27 mars 2021, normalement à Porte Maillot à Paris (on y croit encore !) 😉

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