Fiche Rhino-pharyngite : préparer l’hiver…

J’utilise de plus en plus souvent une fiche « modèle » pour les rhino-pharyngites, et je viens de la mettre à jour en précisant notamment l’évolution et l’absence d’intérêt d’antibiothérapie.
Mon objectif est de m’appuyer sur ces fiches-ordonnances pour mieux faire de « l’éducation à la santé » afin d’aider les patients à reconnaître et traiter seul les rhumes, avec un discours simple et répétitif unique au fil de leurs consultations… Je pense qu’une des raisons qui incite à consulter pour une rhino-pharyngite est justement que les ordonnances changent au gré des humeurs, et que ça peut « tromper » le patient sur le fait qu’il a besoin d’un avis pour une ordonnance personnalisée (ce qui est faux).
Merci à @DrJohnFa pour son idée lumineuse de séparer « traitement naturel » et « traitement chimique » pour le traitement de mal de gorge !
Vous pouvez bien évidemment utiliser cette fiche, l’adapter, l’imprimer et en faire des origamis… bref, en faire ce que vous voulez !
(A noter que le DOLIPRANE, le TUSSIDANE et le PERUBORE sont optionnels… mais c’est plus rapide à supprimer qu’à ajouter). 

 

LAVAGES DE NEZ :
1. DISPOSITIF D’IRRIGATION NASALE TYPE RHINOHORN OU ÉQUIVALENT
– Reconstituer avec de l’eau tiède à 37°C et du sel de table
– Tête penchée en avant et sur le côté : faire couler l’eau dans la narine du dessus
– L’irrigation ne doit pas être désagréable (sinon, la tête est sûrement trop en arrière, ou le sel a été oublié, ou l’eau est trop fraîche…)
– Lavages à volonté, y compris lors du début des prochains rhumes
(Exemple d’utilisation : https://www.rhinohorn.fr/userguide/)
A réemployer par la suite lors des premiers symptômes d’écoulement nasal. 

2. A DÉFAUT, OPTER AU MINIMUM POUR UN NETTOYAGE AU SERUM PHYSIOLOGIQUE / EAU DE MER EN UNIDOSES (PHYSIOMER, STERIMAR, PRORHINEL…)
– Tête penchée sur le côté et laisser couler un peu de sérum
– OU tête penchée en arrière et « injecter » l’eau

TRAITEMENT DU MAL DE GORGE :
– Bonne hydratation
– Traitements « naturels » : miel, boissons chaudes, infusions, traitement phytothérapeutiques…
– Traitements « chimiques » (antiseptiques ou anesthésiques locaux) : LYSOPAÏNE, DRILL, STREPSILS, COLLUDOL…

Paracétamol 1 000 mg comprimé ( DOLIPRANE )
1 comprimé 1 à 3 fois par jour selon besoin, en espaçant les prises de 4h minimum. Maximum 4 comprimés par jour. A avaler avec un peu d’eau, lait ou jus de fruit.

Lavande, thym, romarin, thymol en inhalation (PERUBORE INHALATION CAPS 15)
1 capsule matin, midi et soir dans un inhalateur ou un bol d’eau bouillante pendant 1 à 5 jours. En cas de congestion sinusienne.

Dextrométhorphane bromhydrate 1,5 mg/mL solution buvable sans sucre ( TUSSIDANE s/s )
1/2 cuillère-mesure 1 à 4 fois par jour entre 30 mois et 6 ans
1 cuillère-mesure 1 à 4 fois par jour entre 6 et 12 ans
1,5 cuillère-mesure 1 à 4 fois par jour entre 12 et 15 ans
3 cuillères-mesure 1 à 4 fois par jour après 15 ans.
A prendre selon besoin, principalement le soir au coucher.

HUMIDIFIER L’ATMOSPHÈRE SI BESOIN (notamment en cas de chauffage électrique), LIMITER LES IRRITANTS (TABAGISME)

AUCUN ANTIBIOTIQUE N’EST NÉCESSAIRE DANS UNE RHINOPHARYNGITE, Y COMPRIS EN CAS DE RHINITE PURULENTE.
Les indications ORL sont : otite moyenne aiguë bactérienne – angine bactérienne (prouvée par un test) – sinusite aiguë bactérienne.
En savoir plus : http://www.infectiologie.com/UserFiles/File/medias/Recos/2011-infections-respir-hautes-recommandations.pdf

QUELLE ÉVOLUTION POUR UNE RHINOPHARYNGITE ?
La fièvre dure 2 à 4 jours. L’écoulement nasal ou l’obstruction nasale, la toux évoluent sur une durée plus prolongée de 10 à 14 jours (plus longue en cas de tabagisme).
RECONSULTER EN CAS DE : persistance ou réapparition de la fièvre après 4 jours, changement de comportement de l’enfant, douleurs ou écoulement au niveau d’une oreille, conjonctivité sale, oedème des paupières, gêne respiratoire, signes digestifs (vomissements, diarrhées, refus alimentaire…)

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Levothyrox et la loi des dramas

Petit billet pour faire vivre ce blog, et partager quelques informations mises hier soir et ce matin sur Twitter, dans un contexte « d’agacement » sur le traitement médiatique de la nouvelle formulation du Levothyrox.

Pour remettre dans le contexte en quelques points-clés…

 

Chapitre 1. De quoi on parle.

Le LEVOTHYROX est un médicament qui contient de la lévothyroxine, une hormone thyroïdienne indispensable à une bonne qualité de vie, voire à une vie tout court, dans les cas d’hypothyroïdie (qui peuvent être mortelle avec notamment l’évolution vers un coma myxoedémateux).

L’hypothyroïdie est un problème fréquent : le LEVOTHYROX est la 8ème molécule la plus vendue en France, et concerne 3 millions de personnes.

Le LEVOTHYROX est particulièrement efficace et bien toléré. Une hypothyroïdie est une maladie donnant plein de symptômes résumables en « tout mon corps tourne au ralenti » (fatigue, constipation, baisse de la fréquence cardiaque, chute de cheveux, prise de poids, etc.) ; le LEVOTHYROX traite d’un coup tous ces symptômes. Plutôt pas mal !

Le LEVOTHYROX a quand même un défaut : il transpire énorm… Pardon, non, il a une marge thérapeutique étroite : « trouver le bon dosage » demande parfois des tâtonnements lors de son introduction ; un mauvais dosage peut donc entraîner des signes d’hypothyroïdie, ou au contraire d’hyperthyroïdie (aka « tout mon corps est à l’affût » : insomnie puis fatigue liée à l’insomnie, diarrhée, tachycardie, perte de poids, repousse de chev… ah non, ça non, zut).

Pour trouver le bon dosage, on s’aide de la clinique et d’une prise de sang (TSH, pour hormone de stimulation de la thyroïde – qui sera basse quand on est en hyperthyroïdie parce que ça sert à rien de stimuler, et haute en hypothyroïdie parce que c’est le bon moment pour stimuler)… Ce dosage ne peut être fait qu’un mois après l’introduction ou le changement de dose du médicament, le temps que ça se régularise…

Pour en savoir plus, le Dr Christian Lehmann a fait un thread ici (thread = il faut dérouler…) :

 

Chapitre 2. Ce qui a changé.

En 2003, des scientifiques notaient (rappelaient en fait) que le lactose n’est pas un bon excipient : en plus d’être à effet notoire (pour les intolérants au lactose), il ne conserve pas bien le médicament à 3 ou 6 mois (cf. tableau ci-dessous avec la source mise dessus parce qu’il faut bien se différencier des gens qui racontent n’importe quoi).

Ce tableau dit qu’à 3 mois (et sous 40°C), un comprimé de 100 μg de LEVOTHYROX ne contient plus que 86,9 μg du principe actif si l’excipient est du lactose, contre 90,3 μg si c’est du mannitol

 

A noter que la durée de conservation est de 2 ans pour le LEVOTHYROX. Donc si le 1er janvier 2017 vous aviez une boîte qui se périmait le 1er septembre 2019, c’est que le médicament avait déjà 3 mois dans la vue, et était donc « sous-dosé ». Bref, vous croyiez que l’ancienne formule était toute gentille mais non C’ÉTAIT UNE SACRÉE ARNAQUEUSE !

En 2012, la commission nationale de pharmacovigilance (ANSM) notait dans son rapport que la teneur en principe actif du LEVOTHYROX était plutôt de 105 % du dosage cible, versus 100 % pour le générique (pour justement lutter contre cette diminution du principe actif au fil du temps).

Tout de suite, vous comprenez que surdoser un médicament à marge thérapeutique étroite pour que les patients soient à 105 μg en début de mois (sous réserve qu’ils aient la boîte dès la sortie du laboratoire…) et 95 μg en fin de mois, afin d’être « à peu près » à la dose qui leur convient, c’était franchement pas top. Pourtant ça marchait bien.

Pourquoi ça marchait bien ? Parce que rien ne changeait ! Finalement, pour 2 patients différents « bien » sous 85 μg de LEVOTHYROX par jour, peut-être que l’un prenait 87,5 μg (dès le premier jour) et que l’autre prenait 100 μg (mais en traînant des stocks dans ses armoires).

Il n’empêche que changer l’excipient par un autre qui va mieux est une bonne idée. Et celui qui va bien, ça sera le mannitol (cf. tableau ci-dessus donc : à 6 mois, il est aussi dosé que le comprimé au lactose à 3 mois).

Arrêtons-nous deux secondes sur le mannitol avec cet excellent thread de @qffwffq :

J’en profite également pour rajouter que le mannitol dans le tableau ci-dessus c’est moins de 100 mg par comprimé de LEVOTHYROX. Or, dans nos assiettes…

Sans compter qu’on en trouve dans le citrate de bétaïne (avec l’acide citrique d’ailleurs), que pas mal de patients achètent en pharmacie, sans parler de scandale dans la presse.

Bref, l’ANSM a demandé au laboratoire (Merck) de revoir sa formule a suivi en mars 2017. L’annonce a été faite en loucedé (contrairement à nos collègues Belges qui ont fait une annonce plus importante lors du changement en 2015 – oui, contrairement à ce qui a été raconté sur TF1 ou dans la presse chez Jean-Jacques Bourdin, les Français ne sont pas des cobayes, d’autres pays sont déjà passés au mannitol, vu que bah c’est mieux…)

Le temps que les gens finissent leurs anciennes boîtes, et entament les nouvelles, certains effets de sous-dosage ou de sur-dosage ont commencé à se faire sentir dès avril, pour certains patients.

Encore une petite pause : on parle d’un médicament à dose thérapeutique étroite, dont on modifiait avant la quantité de principe actif pour que ça fasse l’affaire, et dont on change la cinétique de décroissance – laquelle cinétique dépend de variables telles que le délai d’approvisionnement du pharmacien, le temps resté en pharmacie, le temps dans le placard du patient, la température, et la réticence à passer à la nouvelle boîte tant qu’il reste des anciennes boîtes à cause des polémiques… Alors oui, il est tout à fait attendu que certains patients soient gênés !

Et « certains patients », même si seulement 10 % des patients ont un dérèglement passager de leur fonction thyroïdienne, ça représente 300 000 personnes en France… Forcément, ça fait du monde qui peut s’interroger légitimement, et essayer de comprendre !

Heureusement, ils ont pour les guider une presse rigoureuse et scientifique.

 

Chapitre 3. Pas du tout, c’est parti en cacahuète total.

En vrai, nous avons eu un raz-de-marée d’empirisme, et d’exemples personnels (aussi appelé « niveau de preuve 0 »).

Anny Duperey a été citée partout, partout, partout début septembre 2017, pour raconter ses problèmes de diarrhée et de fatigue (l’ayant obligé, dit-elle, à arrêter le sport et surconsommer du café et du GURONSAN pour finir un tournage au Portugal au printemps… Ce qui, noterons-nous, peut expliquer en partie la diarrhée persistante, puisque le cocktail café + caféine (le GURONSAN c’est du café hein) + grosse chaleur + stress n’est pas réputé hyper constipant.) Capture d’écran 2017-09-11 à 00.02.55 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.10 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.16 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.33 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.40 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.46 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.51 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.04.21 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.57 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.02.33 Capture d’écran 2017-09-11 à 00.03.22Vous me pardonnerez, mais il en manque… 20 minutes, Le Figaro, Allodocteurs, L’Obs, le Télégramme… tout le monde a repris l’indignation d’Anny Duperey (actrice que j’aime beaucoup par ailleurs en tant qu’actrice, aucune animosité envers elle).

Evidemment, elle n’est pas la seule. Après Valérie Damidot citée ci-dessus, nous avons eu Jean-Jacques Bourdin qui « s’engage » auprès des « victimes »… Pour ma part, je m’engage totalement auprès des victimes des effets indésirables de raconter n’importe quoi à la radio.

Capture d’écran 2017-09-11 à 00.26.12Bon, après, chacun est libre de dire ce qu’il pense. Comme dit l’Inspecteur Harry (Clint Eastwood), « les avis c’est comme les trous du cul : tout le monde en a un ». Le problème, c’est que le tr… l’avis de certains compte plus, et des gens « dangereux » n’hésitent pas à s’en servir pour mener leur combat stupide.

Merci Isabelle Adjani de faire remonter les sites de désinformation sur les vaccins, excellent travail.Merci Isabelle Adjani de faire remonter les sites de désinformation sur les vaccins, excellent travail. J’adore avoir des patients réticents à se vacciner ou vacciner leurs enfants, alors que c’est à peu près aussi pertinent que refuser la ceinture de sécurité.

 

Et ce ne sont pas les seuls… Vous avez ici dans ce 3ème et dernier thread un petit tour d’horizon des âneries qui ont pu être dites cette dernière semaine (vivement la prochaine qu’on augmente encore le niveau !) :

Face à ces mastodontes qui envahissent toute la presse, les bons journalistes qui font des papiers scientifiques et/ou sourcés se retrouvent péniblement avec 10-20 retweets, tandis que le moindre « le coiffeur de mon voisin m’a dit qu’il avait mal à la tête depuis 3 mois, pile quand il a eu la nouvelle formule de LEVOTHYROX, OMG, le prenez pas, ça donne des trucs graves – enfin, je sais pas, je suis pas médecin » fait un toptweet.

C’est un vrai problème, et probablement le vrai scandale : les travaux scientifiques et même les avis d’experts sont maintenant presque systématiquement masqués par des avis de non-experts suspicieux.

Capture d’écran 2017-09-11 à 00.32.45

Chapitre 4. Ce qu’il faut retenir.

Les liens de quelques bons articles de bons journalistes, à partager quand des gens racontent n’importe quoi :

Bref, TL;DR pour ceux qui sont sous LEVOTHYROX : vous avez des symptômes avec votre nouveau médicament ? Consultez votre médecin, refaites un dosage de TSH. Si vous êtes en hypothyroïdie, augmentez la posologie ; si vous êtes en hyperthyroïdie, baissez. Si c’est normal, ça ne vient très probablement pas de là et il faudra chercher une autre cause (un manque de fer, une dépression, une fatigue par apnées du sommeil, etc.)

Allez, au piiiiiire, même si vous êtes avec une TSH correcte mais que vous sentez que vous êtes en dysthyroïdie et qu’il n’y a pas d’autre cause, redosez la TSH. Et au pire du pire, changez votre traitement d’un demi ou un comprimé de 25 μg dans le sens qui va bien, et redosez votre TSH à 1 mois.

Au final, peut-être que ça ne sera plus le même dosage qu’avant, mais on s’en fiche complètement. D’ailleurs, le dosage que vous aviez avec l’ancienne formule n’avait pas vraiment de sens (diminution de principe actif au fil du temps). Le seul but est que vous soyez bien : avec du LEVOTHYROX 125 au lieu de 100, ou 75, ou peu importe… Ca prendra peut-être un ou deux mois pour retrouver le bon dosage, mais c’est tout. Le mannitol n’y est très très très très très probablement pour rien (z’avez vu comme je suis rigoureux, je ne dis pas que c’est sûr). Il n’y a pas d’interaction attendue non plus. Bref, soyez rassurés, vous n’êtes pas des cobayes (les Belges y sont passés depuis 2 ans), et en plus si le mannitol était si dangereux qu’on le lit ces temps-ci, on aurait vu ces couvertures dans nos kiosques depuis longtemps… 😉

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Le coût des étudiants : en finir avec les idées folles

Je vais traiter un marronnier : le coût des étudiants.

En médecine, on l’entend régulièrement quand il est question de la liberté d’installation, sur le mode « ouiiii mais l’Etat vous a payé, blablabla, vous avez coûté cher, vous nous devez bien çaaaa ». A quoi les étudiants répondent : nous avons travaillé comme externe pendant 3 ans à mi-temps sous-payé (150€/mois, avec 1 trimestre de cotisé pour la retraite par an), sans compter l’internat où nous ne croulons pas non plus sous les diamants. D’autres répondent d’ailleurs mieux avec un thread complet sur les études médicales…


Bref, le coût des étudiants, ça revient comme le rhume en hiver, et c’est souvent à peu près aussi sympathique. Quelques chiffres sont régulièrement repris par les uns et les autres, sur les réseaux sociaux, dans la presse financière (Challenges, Capital…) ou grand public, et ils peuvent donner un peu le tournis quand ils sont pris isolément. Par exemple, voici quelques titres :

  • Capital, 2013 : « Un étudiant à l’université coûte 8000 euros par an à l’Etat » (… chiffre à prendre avec précaution, lit-on dans l’article)
  • Challenges, 2013 : « Combien coûte un étudiant à l’Etat ? (…) 8000 euros en moyenne, dans la moyenne des pays de l’OCDE »
  • BFMTV, 2014, toujours dans la subtilité : « 13000 euros : le coût d’un an d’études en France pour un étudiant étranger »
  • Le Monde, 2016 : « Un étudiant français coûte 13873 euros par an » (encore une fois dans la moyenne)

La France est globalement dans la moyenne européenne des dépenses pour l’éducation de ses têtes blondes, brunes et grisonnantes (DEPP, 2014) : 31 % en-dessous de la moyenne de l’OCDE pour les études primaires, 26 % au-dessus pour les études secondaires et 5 % au-dessus pour l’enseignement supérieur.

Quand on regarde au fil de la scolarité (Journal du Net, 2008), les coûts annuels par élève sont les suivants : 4970€ en maternelle, 5440€ en primaire, 7930€ au collège, 10240€ au lycée, 10740€ en BEP-CAP, 9020€ en IUT, 13360€ en BTS, 13880€ en classe préparatoire… et 8790€ en université (moindre coût car les universités regroupent près d’1,5 millions d’étudiants contre 81 000 en prépa par exemple) ! Un étudiant en fac coûte donc moins cher qu’un lycéen.

Au sein des universités et grandes écoles, il y a également des disparités (Challenges, 2012) : 6 572€ en moyenne par an pour la faculté de droit Paris-2 contre 83 300€ en moyenne pour l’ENA (je vous vois venir avec vos commentaires et le sourire en coin, mais c’est parce que les étudiants de l’ENA sont rémunérés par l’Etat en échange d’un engagement de service de 10 ans).

Quand on continue de zoomer sur ces dépenses, avec l’Observatoire 2015 des Universités et des Ecoles, on constate que :

  • les Universités sont financées à 82 % par l’Etat,
  • 79 % des dépenses concernent la « masse salariale » (dont 4,5 enseignants pour 100 étudiants)
  • la dépense moyenne par étudiant est de 7201€, mais avec des disparités (5390€ en lettres, 9214€ en pluridisciplinaires avec santé) ;
  • hors « masse salariale », les dépenses par étudiant sont de 964€ par an en moyenne (avec des frais d’inscription qui en couvrent le tiers environ). 
  • les Ecoles dépensent davantage : 26 694€ par étudiant ou 6723€ hors « masse salariale », elle-même plus élevée avec 12,5 enseignants pour 100 étudiants.

Finalement, ce qui coûte cher, ça n’est pas l’étudiant mais tout ceux qui gravitent autour. Nous comptons dans un « coût par étudiant » le financement d’enseignants, qui sont aussi chercheurs ; nous y intégrons des frais « très » administratifs, avec des secrétariats à tous les étages, qui ne servent pas toujours directement les étudiants (par exemple les services comptabilité pour rémunérer le personnel…) Et plus l’université « grossit », plus les frais se diluent vers des services « administratifs » ou de « maintien de la structure » ; par exemple il y a 2,8 fois plus d’enseignant/étudiant en prépa par rapport à l’université, pour un coût par étudiant 1,6 fois supérieur.

Enfin, le « coût d’un étudiant » c’est bien beau, mais si ça n’est pas à former des gens pour travailler demain, à quoi sert l’argent du pays ?

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Numerus clausus et déserts médicaux

J’aurais bien fait une série de tweets, mais un ami m’a rappelé que les blogs c’était bien aussi pour partager ses réflexions. Et puis j’ai déjà commenté sur Twitter ce week-end contre le CNG et leur incompréhension de la colère des étudiants ayant eu une journée supplémentaire d’ECNi…

… et je ne voudrais pas donner une image de râleur 😉 

Du coup, en me brossant les dents tout en lisant Twitter (où je passe définitivement trop de temps), je me suis fait la réflexion suivante : « pourquoi certains sont mécontents des passerelles infirmier vers études de médecine, alors qu’il manque de médecins (et d’infirmiers) en France ? » 

Par extension, pourquoi limite-t-on le nombre de médecins (par le numerus clausus) alors qu’il y a un problème de démographie médicale ? C’est vrai, c’est dommage : en 1ère année, on vire 80 % d’étudiants voulant être professionnel de santé et parallèlement on se plaint qu’il n’y a pas assez de médecins / kiné… On ne serait pas un peu cons, dites ? 

Je ne suis pas le premier à me faire la réflexion, mais je trouve que celle-ci est finalement souvent éludée. Pour résoudre le problème de la pénurie de médecins ou les déserts médicaux, tout le monde est sur le pont avec des idées pour attirer le chaland :

  • embaucher un « assistant médical » (avec l’aide de l’ARS) pour réaliser l’activité administrative du médecin… ce qui épargnera 6,4 heures sur une activité hebdomadaire estimée à 55 heures par semaine ;
  • déléguer des tâches répétitives (vaccinations, prise de tension artérielle, de poids, de taille)… ce qui ferait gagner quelques heures par semaine sans doute,
  • créer des maisons de santé pluridisciplinaires pour mutualiser les moyens… avec le risque quand même de devoir se coltiner un regard administratif (ARS ou autre), et perdre le temps économisé à faire des dossiers interminables (d’ailleurs, depuis peu l’EHESP propose une formation pour devenir « coordonnateur en maison de santé pluridisciplinaire »… ou comment les MSP vont peut-être se transformer en « mini-hôpitaux », avec des administratifs qui gouvernent le bouzin et expliquent qu’il faut réduire le personnel soignant « qui crée la dette »).
  • salarier des médecins avec toutes les petites questions que ça peut poser :
    • un médecin du travail ne prescrit pas d’arrêts de travail, mais un médecin salarié de la mairie peut-il prescrire des arrêts à des employés de mairie ?
    • un patient peut-il ressentir une exigence plus particulière envers un médecin qu’il paie par ses impôts locaux ?
    • un médecin peut-il refuser un patient de sa commune, fût-il odieux ?
    • comment consulter un médecin qui bosse sur les mêmes heures de travail que tout le monde ? etc.
  • ouvrir le champ de la télémédecine (je veux bien, mais vous avez vu le tweet avec les histoires des clés USB ?)
  • créer de nouveaux DES pour faire en sorte que ceux qui s’inscrivent en médecine générale ne fassent que ça et rien d’autre (idem pour la médecine d’urgence, la gériatrie, etc.) ; bref, limiter tout profil atypique pour pouvoir mieux ranger des individus dans des cases (mais quel dommage que les nouveaux urgentistes ne seront plus passés 6 mois en médecine générale !),
  • créer un service sanitaire obligatoire pour les étudiants en santé, et éventuellement les obliger à aller faire des stages un peu partout… (ce qui est déjà le cas, ça s’appelle l’externat).
  • tirer un trait sur la liberté d’installation (et là, à part à l’annoncer aujourd’hui pour dans 10 ans, c’est niet – on rappelle l’interdiction de changer les règles en cours de jeu, ce qui est un principe de base appris en cours de récréation pour ceux qui avaient des copains entre 3 et 10 ans).

Bref, beaucoup d’idées, que je ne critique pas au fond (sauf les 2 dernières) ! Bien sûr, je mets ici des aspects un peu négatifs pour contrebalancer l’enthousiasme que j’ai l’habitude de lire à propos de tout ça (sauf les deux derniers points encore une fois – d’ailleurs, toutes ces idées ne sont pas sur le même plan, mais elles sont des pistes citées régulièrement quand on parle de désertification).

C’est clair que c’est sûrement une situation idéale que d’être un médecin salarié dans une MSP avec des assistants médicaux qui aident, une petite musique zen dans la salle d’attente et un thé aromatisé sur le bureau tous les jours à 14h30. Mais on peut bien vivre sans tout ça (et nos patients aussi). Et finalement, si l’ensemble augmente la qualité de vie des médecins (sans doute), la prise en charge des patients (peut-être), il me semble très hasardeux de dire que ça va attirer de nouveaux médecins. Ca ne sert à rien de créer un hôtel de luxe au milieu du Sahara, vous voyez… 

Parce que des médecins, eh bien, je crois bien qu’il en manque, par rapport à la demande actuelle ! 

Scoop, je sais.

Certes, « on n’a jamais été autant de médecins qu’aujourd’hui« , mais il y a peut-être une différence entre les années 50 où on consultait quand l’os sortait à travers la plaie et notre époque où on peut voir 2 fois le même adulte pour le rassurer sur un rhume évolutif… (ahaha, ce troll ^^). Certains clament que nous sommes suffisamment mais pas assez bien répartis sur le territoire ; peut-être, mais en tout cas, nous avons moins de médecins que la moyenne européenne

 

Bref, de toute façon, ça ne sert à rien d’aller plus loin : je ne sais pas dans quel monde vivent les gens qui pensent qu’il y a assez de médecins, mais ils n’ont jamais eu à prendre de rendez-vous chez un dermato ou un ophtalmo (ou par leur secrétaire, chez un médecin non conventionné). Et d’ailleurs pour ces spécialités, ça va s’aggraver dans les années à venir, bien plus que pour les généralistes. Chouette avenir, non ? 

 

Mais du coup, s’il n’y a pas assez de médecins… pourquoi on n’en recale pas moins à l’entrée ? Pourquoi ne pas augmenter le numerus clausus ?

Il y a quelques pistes de réflexion dans cet article d’un membre du bureau de l’association des étudiants. 

Ca risque de surcharger les facultés ! Les locaux manquent : agrandissons encore. Les enseignants manquent : embauchons. Les stages manquent : c’est-à-dire que les services sont soit surchargés d’étudiants, soit en manque d’effectifs médicaux et du coup deviennent de « mauvais » terrains, boycottés (à raison) par les étudiants qui les laissent alors en manque d’effectifs et… bref, voyez l’idée. 

Bon… les sous manquent. Là, il faut savoir ce qu’on veut. Si le projet comporte des facultés, des enseignants-chercheurs et des médecins, oui il faut des sous. Vous n’avez qu’à dédier à ça les taxes sur le tabac, j’en sais rien (il va où cet argent d’ailleurs, il est fléché ?) Augmenter les médecins, c’est aussi risquer d’augmenter un peu la demande et les dépenses de santé (a priori pas énormément, la plupart des gens étant déjà suivis et soignés)… Certes, ça diminuerait un peu le chômage (pas de recherche d’emploi pour les médecins !), mais visiblement ça ne compense pas ça. 

Après, augmenter le numerus clausus, c’est aussi dire à des étudiants : « vous, vous avez trimé, mais ceux après vont trimer un tout petit peu moins »… Et ça, c’est comme dire « des gens vont pouvoir accéder à vos études sans avoir fait la première année » : pour certains, ça ne passe pas, parce qu’il y a un sentiment d’injustice. 

Enfin, je ne suis pas d’accord avec l’idée que les médecins ne s’installeraient pas en zones sous-dotées. S’il y a beaucoup de médecins, il y aura naturellement un retour vers les campagnes. Peut-être pas dans le village de 3 habitants et 2 chèvres, où de toute façon c’est déjà fichu ; mais les médecins retourneraient sûrement volontiers dans ces villages et petites villes qui ont perdu 3 médecins d’un coup (parce qu’un est parti en retraite et que les 2 autres n’ont pas pu affronter un afflux de patients supplémentaires…) 

Bref, un long billet qui part à nouveau dans tous les sens… mais si vous voulez mon avis au point d’avoir lu tout ça jusqu’ici, la solution est peut-être d’abord d’augmenter le nombre de médecins, et ensuite de créer des offres alléchantes pour les répartir intelligemment. 

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Nouveaux DES : petite lecture du soir…

L’arrêté du 21 avril 2017 définit les nouvelles maquettes de DES, les connaissances et compétences attendues des étudiants en fin de cursus de médecine. Je l’ai lu récemment en préparation d’une réunion, et j’en ai tiré quelques points. C’est un peu barbant peut-être, j’ai écrit des billets plus rigolos si vous cherchez bien.

 

1 – Beaucoup de DESC sont devenus des DES.

Ca n’est pas une surprise, et nos confrères de demain seront donc titulaires des diplômes suivants (désolé pour la liste, vous pouvez passer si vous connaissez déjà). Quand c’est pénible, je mets en italique :

  • Diplômes d’études spécialisées de la discipline chirurgicale :
    • Chirurgie maxillo-faciale
    • Chirurgie orale ;
    • Chirurgie orthopédique et traumatologique ;
    • Chirurgie pédiatrique ;
    • Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique ;
    • Chirurgie thoracique et cardiovasculaire ;
    • Chirurgie vasculaire ;
    • Chirurgie viscérale et digestive ;
    • Gynécologie obstétrique ;
    • Neurochirurgie ;
    • Ophtalmologie ;
    • Oto-rhino-laryngologie – chirurgie cervico-faciale ;
  • Diplômes d’études spécialisées de la discipline médicale :
    • Allergologie (co-DES) ;
    • Anatomie et cytologie pathologiques ;
    • Anesthésie-réanimation (co-DES) ;
    • Dermatologie et vénéréologie ;
    • Endocrinologie-diabétologie-nutrition ;
    • Génétique médicale ;
    • Gériatrie ;
    • Gynécologie médicale ;
    • Hématologie ;
    • Hépato-gastro-entérologie ;
    • Maladies infectieuses et tropicales (co-DES) ;
    • Médecine cardiovasculaire (co-DES) ;
    • Médecine d’urgence ;
    • Médecine et Santé au travail ;
    • Médecine générale ;
    • Médecine intensive-réanimation (co-DES) ;
    • Médecine interne et immunologie clinique (co-DES) ;
    • Médecine légale et expertises médicales ;
    • Médecine nucléaire ;
    • Médecine physique et de réadaptation ;
    • Médecine vasculaire (co-DES) ;
    • Néphrologie ;
    • Neurologie ;
    • Oncologie ;
    • Pédiatrie ;
    • Pneumologie ;
    • Psychiatrie ;
    • Radiologie et imagerie médicale ;
    • Rhumatologie ;
    • Santé publique.
  • Diplôme d’études spécialisées de la discipline biologique
    • Biologie médicale.

 

2 – Des surspécialisations restent possibles, avec des restrictions un peu curieuses. Ces « surspécialités » ajoutent un an de formation si les étudiants sont inscrits dans un DES de moins de 4 ans (3 ans pour la médecine générale).

Là encore, ça va être longuet alors je mets en italique, juste pour les passionnés… Les étudiants peuvent être autorisés à suivre :

  • une option (intra-spécialité – aucune en médecine générale) :
    • DES de chirurgie pédiatrique (options précoces) : Chirurgie viscérale pédiatrique ; Orthopédie pédiatrique
    • DES chirurgie viscérale et digestive : Endoscopie chirurgicale
    • DES neurochirurgie : Neurochirurgie pédiatrique
    • DES ophtalmologie : Chirurgie ophtalmopédiatrique et strabologique
    • DES oto-rhino-laryngologie – chirurgie cervico-faciale : Audiophonologie (audiologie et phoniatrie)
    • Co-DES anesthésie-réanimation/médecine intensive-réanimation : Réanimation pédiatrique
    • DES hépato-gastro-entérologie : Endoscopie de niveau 2 ; Proctologie.
    • DES médecine cardio-vasculaire : Cardiologie interventionnelle de l’adulte ; Rythmologie interventionnelle et stimulation cardiaque ; Imagerie cardiovasculaire d’expertise.
    • DES d’oncologie (options précoces) : Oncologie médicale ; Oncologie radiothérapie.
    • DES pédiatrie : Néonatologie ; Réanimation pédiatrique ; Neuropédiatrie ; Pneumopédiatrie.
    • DES psychiatrie : Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent ; Psychiatrie de la personne âgée.
    • DES radiologie et imagerie médicale : Radiologie interventionnelle avancée.
    • DES santé publique : Administration de la santé.
    • DES de biologie médicale (options précoces) : Biologie générale ; Médecine moléculaire, génétique et pharmacologie ; Hématologie et immunologie ; Agents infectieux ; Biologie de la reproduction.
  • Ou une formation spécialisée transversale (inter-spécialité, qui peuvent « théoriquement » être suivies par tous les DES, mais de façon indicative, certains DES les ont limités, comme en médecine générale…) :
    • Addictologie (ok médecine générale)
    • Bio-informatique médicale ;
    • Cancérologie ;
    • Cardiologie pédiatrique et congénitale ;
    • Chirurgie de la main ;
    • Chirurgie en situation de guerre ou de catastrophe ;
    • Chirurgie orbito-palpébro-lacrymale ;
    • Douleur (ok médecine générale)
    • Expertise médicale-préjudice corporel (ok médecine générale)
    • Foetopathologie ;
    • Génétique et médecine moléculaire bioclinique ;
    • Hématologie bioclinique ;
    • Hygiène-prévention de l’infection, résistances, vigilances ;
    • Maladies allergiques ;
    • Médecine scolaire (ok médecine générale)
    • Médecine et biologie de la reproduction-andrologie ;
    • Médecine du sport (ok médecine générale)
    • Nutrition appliquée ;
    • Pharmacologie médicale/thérapeutique ;
    • Soins palliatifs (ok médecine générale)
    • Sommeil ;
    • Thérapie cellulaire ;
    • Urgences pédiatriques.

On notera donc qu’un généraliste n’aura pas le droit de s’inscrire (sauf dérogation ?) en bio-informatique médicale, vigilances, maladies allergiques, médecine de la reproduction, nutrition appliquée, pharmacologie, sommeil.

Je trouve cette restriction particulièrement dommage, alors qu’il était plus simple de laisser tout ouvert simplement ; les restrictions se seraient faites au niveau local, selon les projets proposés… Bien sûr que la foetopathologie ne nous concerne pas, mais sommeil, franchement… quel mal à avoir un généraliste spécialiste du sommeil ? (Je connais la réponse : c’est un généraliste qui ne fera pas de la médecine générale en ville, ce qui est démographiquement dommage… sauf que la recherche et l’éducation, c’est bien aussi, et on pourrait aussi se donner les moyens de miser dessus pour réduire le nombre d’hypnotiques et donc le nombre de consultations).

 

3 – L’arrêté définit les objectifs de la formation, de façon globale puis DES après DES.

Commençons par ce que tout médecin doit savoir faire !

  • Compétences et connaissances communes de la phase socle pour les spécialités médicales et chirurgicales – hors biologie médicale donc (art. 2 à 4 – à noter que ça s’adresse aussi aux spécialités moins « somatiques » telles que psychiatres, médecins de santé publique, médecins nucléaires, radiologues, etc.) :
    • Recueillir des informations
    • Analyser, poser un diagnostic (en prenant en charge dans la globalité et avec les données épidémiologiques)
    • Intégrer les aspects psychosociaux, culturels et spirituels, environnementaux, les handicaps
    • Prescrire et interpréter des examens complémentaires
    • Prescrire un traitement adapté
    • Pratiquer l’éducation thérapeutique adaptée
    • Organiser la sortie d’un patient, rédiger un compte-rendu et savoir coder (!)
    • Gérer les principales urgences médicales simples
    • Politiques de santé publique : hygiène, vaccination, éducation à la santé sexuelle
    • Identifier les risques sur le parcours de soins / déclarer un événement indésirable
    • Gérer son stress, connaître ses limites, gérer le secret médical
    • Effectuer une recherche documentaire, une lecture critique d’articles
    • Connaître les principes du numérique en santé
  • Compétences et connaissances spécifiques de la phase d’approfondissement :
    • Diagnostiquer les pathologies courantes de la spécialité
    • Assurer la prise en charge à l’aide d’arbres diagnostics
    • Maîtriser les dispositifs médicaux spécifiques
    • Pratiquer les actes les plus courants
    • S’assurer de la compréhension de l’information transmise
    • Effectuer le tri en cas d’afflux massif de malades ou blessés
    • Participer à la gestion des situations sanitaires exceptionnelles (esprit attentat)
    • Information un patient sur un protocole de recherche
    • Evaluer les méthodologies et critiquer les conclusions d’essais cliniques
    • Participer à la rédaction d’un protocole de recherche (!!)
    • Présenter les résultats d’un travail de recherche, participer à la rédaction d’un article
    • Produire, mettre en partage ou échanger des données de santé par mail dans le respect du cadre juridique (!!!)
    • Connaître le cadre médico-légal et médico-social
    • Connaître différents types d’exercice : ambulatoire, hospitalisation à domicile (ouverture de postes ?)
    • Connaître les principes de la sécurité des soins et les vigilances
  • Compétences et connaissances de la phase de consolidation (n’existe pas en médecine générale, tant que nous ne sommes pas passés à 4 ans… je ne relance pas après le billet précédent, mais en l’état ce texte est déjà clairement prévu pour un DES en 4 ans)
    • Maîtriser l’ensemble des connaissances nécessaires à l’exercice (hors maladies rares),
    • Connaître le coût des ressources, le rôle d’une CME, de l’ARS et de la HAS (!)
    • Maîtriser l’organisation et la réglementation de l’exercice professionnel (un peu important en MG)
    • Participer au travail en équipe pluridisciplinaire
    • Assurer les gardes, gérer les contraintes de temps (un peu important en MG)
    • Proposer une médecine personnalisée (?)
    • Prévenir les risques
    • Maîtriser le management d’équipe et/ou la gestion d’un cabinet libéral (tranquille en MG sur 3 ans du coup ?)
    • Maîtriser les tarifications, les principes de l’assurance individuelle, de la médecine agréée et de l’assurance maladie (c’est tellement cool qu’on n’ait pas à savoir ça en médecine générale…)
    • Déclarer un événement porteur de risque (l’obsession des lanceurs d’alerte…)
    • Etre capable de participer à l’accompagnement d’étudiants en deuxième cycle 
    • S’impliquer dans les activités académiques : formuler une question, identifier les objectifs, analyser les résultats

 

4 – De façon spécifique, en médecine générale, les objectifs généraux de la formation en médecine générale sont les 6 compétences suivantes :

  • Premier recours, urgence
  • Relation, communication, approche centrée patient
  • Approche globale, prise en compte de la complexité
  • Education, prévention, santé individuelle et communautaire
  • Continuité, suivi, coordination des soins autour du patient
  • Professionnalisme

Notons qu’elles sont déjà citées pour toutes les spécialités dans les objectifs généraux de l’arrêté, à l’exception du terme de « complexité » (mais on parle d’approche globale partout), et de la coordination des soins avec continuité et suivi (il y a l’organisation d’une sortie hospitalière, savoir passer la main, etc.).

Pour les « connaissances », le DES de médecine générale renvoie également à l’arrêté, là où tous les autres DES détaillent (choix d’un 3ème cycle par apprentissage par compétences et « rejetant » les enseignements et connaissances, considérées comme déjà acquises au 2ème cycle). Je trouve ça problématique si on veut maintenir l’idée que la médecine générale est une spécialité comme les autres ; parce que dire « les connaissances sont celles communes à toutes les autres », ça revient à penser la médecine générale comme avant 2004. Il faudrait peut-être envisager un programme « officiel » de connaissances à avoir à la sortie du DES de médecine générale.

 

Il y a bien les 11 familles de situations, mais proposés comme ça dans l’arrêté, ça n’en fait pas un « programme » :

  • situations autour de patients souffrant de pathologies chroniques, polymorbidité à forte prévalence
  • situations liées à des problèmes aigus/non programmées/fréquents/exemplaires
  • situations liées à des problèmes aigus/non programmées/dans le cadre des urgences réelles ou ressenties
  • situations autour des problèmes de santé concernant les spécificités de l’enfant et l’adolescent
  • situations autour de la sexualité et de la génitalité
  • situations autour de problèmes liés à l’histoire familiale et à la vie de couple
  • situations de problèmes de santé et/ou de souffrance liés au travail
  • situations dont les aspects légaux, déontologiques et/ou juridiques sont au premier plan
  • situations avec des patients difficiles et/ou exigeants
  • situations où les problèmes sociaux sont au premier plan
  • situations avec des patients d’une autre culture

 

5 – Pour arriver à ces objectifs de formation, il faut un enseignement derrière…

  • Formation / enseignement :
    • Pour tous les DES, « l’utilisation de méthodes pédagogiques innovantes dans le cadre d’une approche par compétences et adaptées aux caractéristiques des étudiants est encouragée. Sont notamment privilégiées » :
      • Enseignement à distance asynchrone utilisant des modalités différées d’apprentissage, d’évaluation et d’échanges d’informations (c’est-à-dire des MOOC avec forums)
      • Classe inversée
      • Simulation en santé
      • Apprentissage en contexte réel avec débriefing et rétroaction
      • GEP et confrontation-débat
    • Mais la médecine générale a sa propre vision de la pédagogie et propose « en application de (ce que j’ai dit ci-dessus) :
      • travaux d’écriture clinique
      • groupes d’échanges de pratique (GEP)
      • méthodes dérivant des apprentissages par résolution de problèmes (ARP)
      • groupes de formation à la relation thérapeutique (Balint)
      • groupes de tutorat centrés sur les familles de situations définies pour la spécialité
      • ateliers de gestes pratiques y compris avec des techniques de simulation
  • Formation / stages agréés dans un CHU ou une structure liée par convention avec au moins un personnel médical et scientifique (art. 1 du 24/2/1984)

Donc notons que « l’innovation est encouragée (…) notamment privilégiée » : toute méthode pédagogique est valable. Les MOOC sont aussi encouragés (et c’est une bonne chose quand on voit le temps d’enseignement à prévoir…).

Sauf que les généralistes ont décidé de se tirer une balle dans le pied en supprimant la ligne « Enseignement à distance asynchrone (…) »

 

6 – Une balle dans le pied… parce que l’enseignement est plus long qu’avant ! 

  • 2 demi-journées d’enseignement par semaine : une en supervision (à l’heure actuelle en médecine générale, c’est 20-25 demi-journées par an en moyenne, il faut donc à peu près doubler ce nombre) et une en autonomie, pendant chaque semestre .
  • 6 stages en médecine générale pour l’instant (un par semestre) : 1 stage en médecine ambulatoire + un stage en médecine d’urgence + un stage en médecine polyvalente (inversion possible si les places manquent, avec un décalage de l’urgence en 2ème année) + un stage sur le suivi de la femme + un stage sur le suivi de l’enfant (les deux pouvant être cumulables) + un stage en autonomie en médecine ambulatoire.

Alors bien sûr, on peut dire qu’un staff au CHR compte comme la demi-journée de formation en supervision, ou que la formation se fait au lit du malade (« apprentissage en contexte réel et rétroaction… ») ; et puis au CHR, c’est un peu plus évident de rassembler beaucoup d’étudiants pour un topo fait par le PU référent de l’enseignement X ou Y. Ca se passe déjà comme ça, avec des enseignements qui vont sans doute rester, et ça ne changera pas tant que ça.

Mais pour la médecine générale, une spécialité hors CHR la plupart du temps, où on a décidé de supprimer tout enseignement pour favoriser les groupes (échanges de pratiques, Balint) et les écritures (impossible en supervision), il risque d’y avoir un manque de main d’oeuvre… .

 

 

7 – Enfin, il y a des évaluations périodiques à la fin de la phase socle et de la phase intermédiaire

Pour la médecine générale :

  • Présence en stage et en cours, validation de la production personnelle de l’étudiant
  • Evaluation du portfolio et argumentation orale des travaux personnels du portfolio

Il y a donc désormais un mémoire de DES devant un jury, à présenter 2 à 3 fois pendant le cursus. Sachant que les thèses doivent désormais être dans la spécialité (arrêté du 12 avril), voilà un combo qui va augmenter le nombre de jurys (thèse + mémoire) des rares universitaires de médecine générale, qui vont déjà devoir gérer un doublement du nombre de demi-journées de formation des étudiants.

Est-ce vraiment bien réfléchi pour notre spécialité ?

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